Avec la gamme Moto 2015 telle qu'elle était définie par Motorola en juillet dernier, le modèle haut de gamme de la marque se devait d?être le très grand Moto X Style (avec son écran de 5,7 pouces). Trop grand même, aussi pour entrer dans la poche du consommateur que pour prétendre au titre de flagship, en concurrence frontale avec les iPhone 6S et Galaxy S6 (et S6 Edge), largement plus compacts. Avec le Moto X Style (pour remplacer le Nexus 6), le Moto X Play (pour se positionner sur le milieu de gamme) et le Moto G (qui remplace cette année un Moto E définitivement oublié), difficile de retrouver le Moto X (2e gen) qui nous avait tant plu l'année dernière.
Enfin un Snapdragon 810 chez Moto !
Et autant le dire tout de suite, la présence du Moto X Force dans le catalogue de Motorola était clairement attendu. La seule absence du Snapdragon 810 parmi les modèles annoncés laissait clairement envisager l'arrivée d'un mobile plus ambitieux encore. Ce n?était donc pas vraiment une surprise d'apprendre son existence, même si la marque américaine risquait encore de nous priver de son meilleur modèle annuel, à l'image du Moto Maxx l'année dernière. Ce ne sera pas le cas. Et cela aurait été vraiment dommage, comme le montre déjà cette fiche technique :
- dimensions : 149,8 x 78 x 7,6-9,2 mm
- poids : 169 grammes
- ratio écran / taille : 69,8 %
- châssis résistant à l'eau et à la poussière (certification IP52)
- écran Amoled Quad HD de 5,4 pouces (résolution de 540 pixels par pouce) avec technologie ShatterShield
- chipset Snapdragon 810 de Qualcomm avec quatre coeurs Cortex-A57 cadencés à 2 GHz et quatre coeurs Cortex-A53 cadencés à 1,55 GHz.
- GPU Adreno 430
- 3 Go de mémoire vive
- 32 ou 64 Go de stockage interne (extensibles par microSDXC)
- batterie de 3760 mAh (non amovible) compatible Quick Charge 2.0 et chargement sans fil (normes Qi)
- compatible LTE catégorie 6, WiFi ac MiMo, Bluetooth 4.1, GPS (Glonass), NFC, infrarouge
- double haut-parleur frontal stéréo
- capteur photo 21 mégapixels avec double LED, autofocus à détection de phase, objectif ouvrant à f/2.0, compatibilité 4K en vidéo
- webcam 5 mégapixels, objectif grand-angle ouvrant à f/2.0 avec flash LED
- Android 5.1.1
Dans cette belle fiche technique, qui ressemble beaucoup à celle du Moto X Style (la taille d?écran en moins), vous remarquerez qu'un élément brille pa son absence : le lecteur d'empreinte qui se généralise pourtant chez les concurrents (notamment chez Sony et Samsung). Voilà qui pourrait paraître étonnante vis-à-vis du paiement sur mobile. Mais compte tenu des conditions de compatibilité d'un terminal avec Android Pay, seul le NFC est obligatoire (contrairement à Samsung Pay qui ne nécessite que le lecteur d'empreinte). Pour le reste, aucune surprise, donc.
Un vrai Moto qui a son propre style
Côté ergonomie non, il n'y a pas de vraies surprises : le Moto X Force reprend le langage design de la ligne Motorola avec une certaine assiduité. La courbure du châssis à l'arrière (qui prend 2 mm d?épaisseur entre les côtés et le centre). L?habillage texturé à l'arrière (et totalement personnalisable via Moto Maker). Le bloc photo à l'arrière, tout en longueur avec le capteur, le flash et la petite partie convexe où a été gravé le logo de la marque.
Le logo CE est sur la tranche pour éviter de devoir marquer le capot. Le flash à l'avant, à l'opposé de la webcam. Les larges bordures autour de l?écran (encore largement optimisables). Nous sommes en terrain connu. Remarquez ici deux petites innovations : l'usage du nylon pour réaliser un effet nervuré au dos et l'intégration de deux petits haut-parleurs stéréo sous l?écran (l?écouteur téléphonique n'assurant pas ce rôle).
Comme avec le Moto X Style, les tranches du smartphone sont renforcées avec du métal pour donner une véritable impression de solidité sans avoir besoin de le jeter contre un mur (au risque d'abîmer la peinture du mur...). Sur les tranches vous retrouvez une configuration assez classique avec les boutons matériels à droite et une absence d?élément à gauche. Le tiroir pour la nano SIM et la microSD est situé sur la tranche supérieure, non loin du port jack 3,5 mm. À l'opposé, le port micro USB est bien seule...
Concernant ces tranches, nous y avons trouvé une subtile différence en comparant le X Force avec le X Style. Regardez bien la limite haute du dos de l'appareil : la ligne qui entoure le revêtement en nylon est droite, contrairement à celle du Moto X Style qui forme un creux. Il y a deux écoles chez les designers de Motorola : les adeptes de la ligne droite (Moto X Force, Moto X Play) et les adeptes de la ligne courbe (Moto X Style, Nexus 6, Moto G 3e gen, Moto X 2e gen). À vous de choisir votre camp.
Un mobile très imposant dans la main
Il y a deux écoles en téléphonie : ceux qui optent pour des coques droites (type Apple, Samsung, Huawei) et ceux qui préfèrent des formes qui épousent la main (LG, Motorola). De fait, la prise en main du Moto X Force est pareille à celle des autres Moto : assurée, franche et pleine. La construction du smartphone est très bonne, très qualitative, meilleure encore que celle du Nexus 6. Mais elle ne conviendra certainement qu?à ceux qui ont de bonnes pognes. Les dimensions du mobile (notamment l?épaisseur à la ligne médiane) font du X Force un objet plutôt masculin. Pour preuve, ce modèle s'appuie sur la même circonférence que le X Style : 174 mm environ. Et pourtant, l?écran de ce dernier mesure 0,3 pouce de plus. Le X Force est clairement le Moto de 2015 qui optimise le moins bien sa surface avant vis-à-vis de la taille de son écran.
En parlant justement d?écran, le Moto X Force se distingue des deux autres Moto X de cette année par la technologie de rétroéclairage : ici de l?AMOLED, contre de l'IPS dans les deux autres cas. Le Moto X Force prend donc la relève ici aussi du Moto X de 2014 qui usait également d'une telle dalle. En revanche, le grain est ici hautement plus fin, puisque nous passons d'un Full HD 5,2 pouces à un Quad HD 5,4 pouces. À quelques pixels près, le Moto X Force devient le Moto avec la meilleure résolution d?écran (540 pixels par pouce). Grâce à l?AMOLED, l?écran offre ici une belle luminosité, des couleurs vibrantes et des angles de vision bien ouverts. La protection ShatterShield est également de bonne qualité, puisqu'elle offre une bonne réactivité aux sollicitations.
Une interface qui ne change pas (et c'est tant mieux !)
Une fois allumé, le Moto X Force propose la même interface que les deux autres Moto X de 2015 : Android 5.1.1 Lollipop sans artifice. Motorola garde donc son engagement de ne pas dégrader l'expérience d'Android imaginé par Google. C'est donc logiquement que certaines nouveautés apparues sur les Nexus sont également disponibles sur les Moto à quelques jours d'intervale. C'est le cas par exemple du lanceur d'application et sa ligne de raccourcis adaptative. Aucun regret vis-à-vis des surcouches constructeur : l'interface est ici d'une très bonne fluidité et d'une grande simplicité. Il ne manquerait plus que le Google Now Launcher et nous pourrions nous croire dans un Nexus.
Il faut cependant reconnaître à Motorola une certaine intelligence dans son choix d'interface (intelligence que d'autres constructeurs, comme Sony, semblent découvrir ces derniers mois) : sans surcouche, moins de travail d'adaptation des mises à jour d'Android ; sans surcouche, Google Play suffit amplement à mettre à jour les applications maison. Des applications comme l?Appareil Photo, que nous verrons dans la partie multimédia du test, mais aussi Assistant (Aide), Galerie, Connect et le fameux Moto, l'application qui donne vie à chaque Moto. Avec cette dernière et comme avec le Moto X 2e gen, le Moto X Force s'adapte, écoute, parle et vous reconnaît. Cette application est particulièrement fameuse. Vous remarquerez que certaines applications moins indispensables ne sont pas préenregistrées, comme c'est le cas de Migrate.
Des performances pas évidentes à découvrir
L'interface est donc fluide. Les réponses de Moto et Moto Voice sont pertinentes et rapides. Pour apporter cette vivacité, Motorola a opté pour le Snapdragon 810 de Qualcomm, le fameux octo-core à la réputation sulfureuse. Au quotidien, ce chipset, aidé ici de 3 Go de mémoire vive, se comporte relativement bien. C'est souvent quand il faut solliciter ses Cortex-A57 que l'aisance n'est plus aussi palpable. Comme avec le OnePlus 2 et le Nexus 6P, nous avons eu des difficultés à extirper les vraies capacités de l'octo-core.
En effet, les mesures prises par Motorola pour contenir la propension du chipset à émettre de la chaleur ont tendance à le brider très, très rapidement, faussant totalement les résultats des benchmarks. Nous avons effectué beaucoup de tests pour parvenir à un score cohérent que vous pouvez découvrir sur les captures d?écran ci-contre. Notez que c'est souvent quand le mobile est branché sur une source d'alimentation qu'il a tendance à lâcher les chevaux. Peut-être est-ce pour assurer un niveau satisfaisant d'autonomie (lequel est même très bon au demeurant).
Sur AnTuTu v6, nous obtenons 84 818 points. Sur Basemark OS II, nous obtenons 1587 points. Sur Geekbench 3, nous atteignons 706 points en single core et 2317 points en multi-core. Sur les tests graphiques, nous obtenons 26 010 points sur Ice Storm Unlimited, 2065 points sur Slingshot ES 3.0 et 1163 points sur Slingshot ES 3.1. Enfin, nous avons intégré Basemark OS X qui atteint 24 734 points (avec la meilleure qualité graphique). Comparons cela au Xperia Z5 Premium testé dans nos colonnes la semaine dernière avec les mêmes versions des benchmarks. Notez que le Xperia Z5 est lui aussi équipé d'un Snapdragon 810 et de 3 Go de RAM. En revanche, sa résolution, lors des tests, est Full HD (et non Ultra HD).
Sur AnTuTu, le Moto X Force obtient une meilleure note, notamment sur les performances de l'interface. Ce n'est pas une surprise puisque celle de Motorola est clairement plus légère, alors que celle de Sony méritera d?être épurée. Sur Basemark OS II, le mobile de Sony est devant, en revanche, certainement grâce à sa résolution d?écran plus légère lors des tests : Full HD chez Sony (l?Ultra HD étant désactivé) contre Quad HD chez Motorola. Cela se confirme d'ailleurs dans les tests techniques puisque le Motorola est généralement légèrement derrière.
Une très bonne plate-forme multimédia
Pour autant, cela ne veut pas dire que le mobile se comporte mal en multimédia, bien au contraire. Car la comparaison avec le Z5 Premium est techniquement plutôt flateuse. Côté jeu, le Moto X Force est une bonne console portable. Dead Trigger 2, après avoir forcé le passage vers la meilleure qualité graphique, tourne parfaitement bien. Nous apprécions particulièrement l'effort de Motorola de proposer du son stéréo en façade avec les deux petits haut-parleurs sous l?écran. Ils sont très bien placés. Bravo ! La dalle Shattershield, en revanche, semble légèrement moins glissante qu'une dalle Gorilla de Corning traditionnelle. Mais la sécurité n'a pas de prix.
Côté vidéo, la dalle AMOLED est évidemment particulièrement détonnante dans cet exercice. De belles couleurs. Un beau grain. De beaux contrastes. Et qui plus est avec un son de qualité grâce aux deux haut-parleurs. Reste évidemment à trouver un bon lecteur vidéo pour aller avec. Car, malheureusement, le Moto X Force est livré avec une version de Galerie customisée par Motorola, mais dont le lecteur intégré est presque identique à celui d'Android Vanilla. C'est-à-dire inutile. Très limité dans les codecs pris en charge (meilleure prise en charge en vidéo qu'en audio), pas de sous-titres, pratiquement aucune option d'affichage. Il faudra donc vite aller chercher une alternative.
Toutes les améliorations 2015 en photo (mais pas plus)
Enfin, en photo, nous retrouvons ici l?équipement du Moto X Style. Attendez-vous donc à des résultats très similaires à ceux obtenus lors de notre test de ce dernier, publié il y a quelques semaines. Le bilan est le même, que ce soit pour la faiblesse des options de l'application photo, que la prise en main tactile avec laquelle l'autofocus à détection de phase est tellement rapide que le mobile prend la photo instantanément, où que vous tapotiez sur l?écran. Surprenant au départ, notamment si vous êtes un adepte du focus manuel pour essayer de régler l'exposition en fonction du point que vous indiquez. Heureusement, les boutons volumes peuvent aussi servir de déclencheur : ouf !
Et le résultat ? Comme sur le LG G4, le Moto X Play et le Moto X Style, pour qui la vitesse était un atout considérable, vous disposez ici d'un APN très rapide. Peut-être même trop. Cela se ressent dans le manque de contraste dans le cliché, même si, dans l'ensemble, la scène est harmonieuse et sans aucune fausse note. Cela se ressent aussi dans le mode rafale, car les photos sont légèrement plus ternes et moins lumineuses que ce que à quoi nous pouvions nous attendre. La vitesse ne fait pas tout donc. Elle empêche certainement en partie le capteur d'obtenir toute la lumière dont il aurait besoin. Cependant, ne soyons pas trop durs : les Moto de la génération précédente n'offraient pas un rendu aussi net. Mais l'amélioration n'est pas spécifique au Moto X Force, mais à l'ensemble de la gamme 2015.
Enfin un Moto qui a les épaules pour affronter la concurrence !
En conclusion, le Moto X Force n'a pas de difficulté à se positionner comme LE modèle haut de gamme de Motorola cette année. Évinçant tous les autres Moto X, il s'impose par sa plate-forme, son beau châssis, quelques choix esthétiques ambitieux et agréables, et toujours cette fameuse application système, Moto, que l'on peut taquiner plus encore que Cortana ou Siri. Un mobile qui ne vous laissera pas tomber, dans tous les sens du terme : il ne se cassera pas (facilement), il vous avertira quand ce sera nécessaire, il dispose d'une bonne batterie et il résiste même à la pluie. Bref, le meilleur des Moto assurément.
Reste évidemment deux petits problèmes. D'abord celui des performances avec le Snapdragon 810, qui n'empêche pas Android de fonctionner, mais pourrait s'avérer pénalisant si vous avez besoin d'en avoir sous le pied. Ensuite celui du prix : 700 euros, ce n'est pas rien. Évidemment, vous trouverez certainement le moyen de faire baisser la note avec une ODR et un financement opérateur. Même s'il ne commet pas l'erreur (comme le Z5 Premium) de passer au-dessus du prix de l'iPhone 6S, il ne devra pas se battre uniquement avec le smartphone d'Apple, mais aussi avec tous les flagships de cette année, notamment le Galaxy S6 dont le prix a été largement revu à la baisse en open market.