Qualcomm n’a certainement jamais dû surmonter une telle campagne négative que celle qu’il subit actuellement. Alors qu’il doit se battre sur l’entrée et le milieu de gamme avec un MediaTek toujours aussi compétitif et de plus en plus performant, le fondeur américain doit également justifier ses choix technologiques sur le haut de gamme, là où sa légitimité n’a jamais été mise en doute.
Le Snapdragon 810, chipset à la réputation ardente (dans tous les sens du terme), aurait dû animer l’ensemble des smartphones haut de gamme de ce début d’année. Aujourd’hui, deux modèles seulement ont été confirmés : le Mi Note Pro de Xiaomi et le G Flex2 de LG. Chez Samsung, les rumeurs semblent indiquer que le leader mondial hésite à s’en passer afin d’attendre que Qualcomm revoie sa copie. Une première. Et d’autres pourraient suivre le même exemple, comme l’étoile montante chinoise OnePlus.
Cependant, le développement du Snapdragon 810, composé de huit coeurs 64-bit (quatre Cortex-A53 et quatre Cortex-A57 cadencés jusqu’à 2,8 GHZ) et d’un puissant GPU Adreno 430, a coûté cher. Et il n’est évidemment pas question pour Qualcomm de ne pas rentabiliser cet investissement. De plus, le Snapdragon 810 est une étape importante dans la stratégie produit : premier chipset haut de gamme octo-core et 64-bit. C’est toute la réputation de la prochaine génération de composants qui est en jeu. Ainsi que les bonnes relations avec les constructeurs, courtisés par nVidia, MediaTek, Intel et consorts.
Une campagne autant de communication que de motivation
Pour remonter le moral de ses troupes et se rapprocher de ses partenaires (constructeurs et opérateurs), Qualcomm a entamé une campagne de promotion institutionnelle. Première étape : parler aux journalistes. Un communiqué de presse officiel de l’entreprise a été envoyé aujourd’hui. Dans celui-ci, Qualcomm rappelle tous les avantages de la plate-forme Snapdragon 810 (dont certains ne sont pas liés spécifiquement à la plate-forme et aux coeurs, mais à ses à-côté comme Hexagon, Adreno, modem LTE multimode, etc.). Des avantages à destination des constructeurs, mais aussi des opérateurs. Un double discours complémentaire pour toute la chaîne de valeur du smartphone.
Deux détails incroyables dans ce communiqué de presse. Le premier est une déclaration de Qualcomm : près de 60 plates-formes seraient actuellement en développement sous Snapdragon 810. Mais dans ces 60, beaucoup ne devraient jamais voir le jour. Parce que certaines sont des prototypes qui répondent à plusieurs stratégies pour chaque constructeur. Mais aussi parce que certaines seront annulées compte tenu des derniers développements autour du Snapdragon 810. Et les rumeurs d’un chipset optimisé pour les besoins de Samsung pourraient également avoir une incidence sur cette soixantaine de prototypes... et la date de commercialisation de certains d’entre eux. De l'aveu de Qualcomm lors de la présentation de ses résultats, le nombre de flagship sous Snapdragon 810 devrait être restreint.
Tout un bataillon pour sauver Rambo ?
Second « détail » incroyable : Qualcomm est parvenu à rassembler une brochette de constructeurs pour soutenir le chipset. Ils sont six : LG, Xiaomi, Microsoft, Oppo et Motorola. Les trois premiers sont attendus. LG a été le premier à soutenir le Snapdragon 810, même si les rumeurs d’un chipset amélioré pour Samsung ne lui ont certainement pas fait plaisir. Xiaomi est, avec LG, l’un des seuls à avoir officialisé un mobile avec le Snapdragon 810. Il serait malvenu qu’il ne participe pas à cette campagne. Enfin, Microsoft a signé un accord d’exclusivité avec Qualcomm. Difficile également pour lui de ne pas soutenir son choix, vaille que vaille. Quant à Oppo, le fabricant haut de gamme chinois se fournit depuis plusieurs années exclusivement chez le fondeur américain (S4 Pro, SD600, SD400, SD801, SD615, etc.). Là aussi, il y a une certaine logique.
La présence de Motorola est déjà plus surprenante, car le constructeur américain est désormais une filiale de Lenovo, qui entretient de bonnes relations avec MediaTek. Motorola s’exprime-t-il donc aussi au nom de Lenovo ? Et pourquoi participer à une telle campagne si ce n’est pour défendre un potentiel futur flagship sous Snapdragon 810 (un Moto X 2015 par exemple) ? Voilà qui provoque quelques questions. La présence de Sony est également suprenante. Les rumeurs semblent indiquer que le constructeur japonais pourrait avoir du retard avec son Z4. Un retard qui lui ferait manquer un lancement à Barcelone, alors que c'était l'une de ses habitudes. Ce retard est-il dû à un réajustement de sa stratégie semestrielle, ou aux problèmes du Snapdragon 810 ? Mystères.
Samsung brille par son absence
Évidemment, vous ne trouverez pas dans ce communiqué de trace de Samsung. Alors qu’il s’agit d’abord du leader mondial, ensuite du meilleur client de Qualcomm et enfin de son prestataire fabricant (il fabriquera des chipsets FinFET 14 nm pour Qualcomm dès cette année). L’absence de Samsung est évocatrice : soit le fondeur n’a pas souhaité l’inclure, soit le constructeur a refusé de participer. Dans un cas comme dans l’autre, les relations semblent être tendues.