Si le BlackBerry Classic et le BlackBerry Passport ont été applaudis par les analystes et les observateurs comme un retour aux vraies valeurs de la marque, les deux smartphones n’ont cependant pas permis au constructeur canadien de renouer avec la profitabilité, notamment sur sa division smartphone. Oui, l’entreprise va mieux, mais ce n’est pas grâce à ces terminaux, mais grâce à son offre logicielle qui s’étoffe, mois après mois, grâce à des acquisitions stratégiques.
BlackBerry OS : le boulet de John Chen ?
En fin d’après-midi en France (et en début de matinée à Waterloo), BlackBerry annoncera ses résultats pour le deuxième trimestre de son année fiscale 2016. Selon les analystes financiers, John Chen devrait annoncer des pertes nettes de l’ordre de 9 centimes par action. Ce qui correspondrait, à peu près, à 50 millions de dollars de perte. Ce qui n’est évidemment pas bon. L’un de ses analystes, Daniel Chan de la banque d’affaires Scotia Capital, a même expliqué, dans un rapport cité par nos confrères canadiens du Financial Post, que BlackBerry ne redeviendra pas rentable tant que son patron n’abandonnera pas BlackBerry OS.
Il explique que le système d’exploitation est techniquement supérieur à certains concurrents (Android n’est pas nommément cité, mais transparaît clairement dans sa déclaration), mais il n’est plus un argument de vente assez important auprès des clients, qu’ils soient professionnels ou particuliers. Et la mise à jour qui offrait la compatibilité avec les applications Android, lesquelles sont distribuées via l’Amazon AppStore, ne s’est pas avérée être « la panacée ». Bénéfice économique zéro (ou presque).
266 millions de dollars d'économie par an
Le problème de BlackBerry OS est double. Non seulement le système d’exploitation empêche les ventes de se réaliser, mais les deux tiers du budget de recherche et développement sont consacrés à la conception des terminaux. Selon l’analyste, BlackBerry pourrait économiser 266 millions de dollars par an (soit plus que la valeur de ses pertes nettes annuelles) en arrêtant de s’acharner sur BlackBerry OS. Il faudrait cependant couper des têtes : 1400 postes à supprimer. Un plan de restructuration était annoncé au début de l'été, et nous estimions alors qu'il concernait principalement les équipes du système d'exploitation.
Remplacer cet OS par Android aurait plusieurs avantages, selon l’analyste. D’abord, le système d’exploitation offrirait l’accès à l’ensemble de la suite Google (et non à quelques bouts épars). Ensuite, l’interface serait plus conviviale, ce qui convaincrait une frange du grand public qui cherche à renouer avec la marque canadienne. Enfin, grâce à son offre logicielle basée sur les besoins de l’entreprise (notamment en terme de sécurité, de gestion de parc et d’échange de données), BlackBerry parviendrait à se différencier des centaines de modèles concurrents. Ces trois avantages lui permettraient d’atteindre plus facilement l’objectif de John Chen : vendre 10 millions de smartphones par an.
L'équation impossible à équilibrer
Bien sûr, il y a un risque : si BlackBerry abandonne son OS, il baisse aussi le niveau de sécurité de ses terminaux. Ce qui ne plaira évidemment pas à ses deux typologies de clients les plus fidèles aujourd’hui : les grandes entreprises industrielles réglementées et les gouvernements. Car, malgré tous les efforts de Google et Samsung, l’image d’Android évoque l’insécurité. Voilà qui ne va certainement pas aider à prendre la décision.
En attendant de remercier BlackBerry OS, John Chen tentera certainement de concilier des deux mondes avec une offre mixte. Le premier mobile sous Android de BlackBerry, connu sous le nom de Venice, devrait s’appeler le Priv, comme « private ». Une allusion à la protection des données ou à l’usage qui en est attendu ? La réponse, certainement, dans les prochaines semaines. L’année dernière, le Passport a été officialisé le 24 septembre.