Le 28 octobre dernier, Nintendo a organisé une conférence de presse pour présenter à tous les observateurs financiers les premiers résultats de ses travaux avec DeNA, le studio japonais spécialisé dans le jeu sur mobile dans lequel le groupe de Kyoto a pris une participation. Cette première application, appelée Miitomo, n’est pas totalement ludique, mais plutôt sociale. Légèrement décevant donc pour tous ceux qui attendaient de contrôler Mario ou Link depuis l’écran tactile de leur smartphone. Mais cela n’est que partie remise puisque Nintendo a déclaré que les premiers vrais jeux arriveraient au printemps prochain.
Nintendo optera pour le freemium
Sur quel modèle économique s’appuieront-ils ? Selon le Wall Street Journal qui rapporte des propos tenus la semaine dernière par Isao Moriyasu, le patron de DeNA, toutes les applications en cours de développement pour Nintendo seront gratuites au téléchargement. Comprenez qu’il s’agira de jeux freemium financés à partir d’achats intégrés. Une pratique relativement usuelle désormais en téléphonie mobile. Notamment chez DeNA, puisque le studio japonais s’est fait une spécialité dans ce genre d’exercice. Que ce soit ses créations originales (Blood Brothers, Super Battle Tactics, Hellfire) ou les licences de partenaires (Final Fantasy Record Keeper, Transformers Battle Tactics, Star Wars Galactic Defense, Marvel Mighty Heroes), tous sont freemium. Il est donc assez logique que ceux qui seront développés pour Nintendo le soient aussi.
C’est déjà plus étonnant de la part de Nintendo. D’abord parce que la cible naturelle de l’éditeur japonais est plutôt jeune, et donc (normalement) moins apte à acheter des options payantes, même s’il n’y a pas d’âge pour avoir envie de casser la tirelire quand le jeu devient trop frustrant. Nous nous souvenons de toutes les polémiques qui ont eu lieu l’année dernière quand des parents ont demandé à Apple et Google le remboursement d’achats abusifs réalisés par leurs enfants. Les achats intégrés et les bambins, ça ne fait pas toujours bon ménage. Et déontologiquement, ce n’est pas top.
Un modèle qui manque de naturel
La seconde raison pour laquelle il est étonnant que Nintendo s’oriente sur une stratégie vidéoludique mobile freemium est sa politique historique sur les contenus dématérialisés. Que ce soit sur DS, 3DS, Wii ou Wii U, Nintendo a toujours opté pour un modèle premium, qu’il s’agisse de son bas de catalogue ou des jeux indépendants. L’entreprise a même été la dernière (face à Sony et Microsoft) à intégrer dans son modèle économique le système des DLC, les contenus additionnels payants pour les jeux complets. Ce qui a certainement eu pour effet de réduire l’intérêt des éditeurs tiers pour ses plates-formes. Le modèle freemium est à l’opposé de ses habitudes.
Mais Nintendo a certainement été conseillé par DeNA pour faire un tel choix. Car, sur smartphone, le modèle premium (achat du jeu sans options payantes) n’a pas vraiment la cote. Les joueurs sur téléphone veulent essayer avant d’ouvrir le porte-monnaie et parfois même jouer sans l’aspect financier. Nous sommes loin du modèle originel sur console où il faut payer avant de voir. C’est archaïque diront certains. Mais c'était ainsi. Nintendo s’adapte donc aux nouvelles conditions de marché. Une bonne nouvelle, même si cela ne nous paraît pas vraiment naturel.