La guerre économique qui sépare Apple et Qualcomm pourrait se terminer dans les prochains mois si les deux entreprises parviennent à un accord. Car la résolution du conflit, pour l’un ou pour l’autre, n’arrivera certainement jamais par la voie judiciaire, tant le dossier est tentaculaire. L’affaire touche une cinquantaine de plaintes déposées auprès de tribunaux dans une quinzaine de pays différents, dont l’Allemagne, la Chine et les États-Unis. Et chaque tribunal pourra, selon sa compréhension du dossier, interférer en la faveur de l’une ou de l’autre des parties (s’il choisit de ne pas renvoyer le dossier à une autre cour, comme nous l'avons vu avec Samsung).
Voici un premier exemple. En septembre dernier, nous rapportions dans nos colonnes qu’Apple avait remporté une victoire aux États-Unis. Une cour californienne a estimé que Qualcomm avait manqué de sérieux quant à la défense de ses brevets dont la paternité était remise en cause par Apple. L’idée de la firme était simple : si les brevets ne sont pas valides, ils ne peuvent pas être violés. Cette décision, préliminaire au vrai procès, mettra des bâtons dans les roues de la défense de Qualcomm.
Une manche pour Qualcomm
Autre exemple, en Chine cette fois-ci. Qualcomm a déposé une plainte auprès de la justice chinoise pour violation de brevets, comme dans bien d’autres pays. Les deux brevets concernés n’ont aucune relation avec la connectivité réseau (il ne s’agit donc pas des brevets fondamentaux). Ces deux brevets, déposés auprès de l’agence chinoise de gestion de la propriété intellectuelle (SIPO), expliquent comment un utilisateur de smartphone peut redimensionner une photo et comment il peut gérer ses applications dans le système d’exploitation.
En outre, il ne s’agit pas vraiment d’une violation de brevets, mais davantage d’un impayé sur des brevets (car Apple ne nie pas les utiliser, mais estime que le prix de certains d’entre eux est trop élevé). Cependant, Apple les utilise sans payer. Et c’est une faute. La cour a donc émis un avis en faveur du plaignant qui a obtenu une ordonnance provisoire qui interdit l’importation, la présentation et la vente de sept modèles d’iPhone. Les modèles concernés sont les iPhone 6S, 6S Plus, 7, 7 Plus, 8, 8 Plus et X. Il n’y a donc aucun des trois derniers iPhone.
Une ordonnance très problématique
Si la présence de l’iPhone X ne devrait avoir aucune incidence pour Apple (mais davantage pour les partenaires distributeurs et opérateurs qui ont encore ce modèle en stock), la présence des iPhone 7, 7 Plus, 8 et 8 Plus peut être pénalisante pour la firme de Cupertino. Car ils représentent la porte d’entrée de son catalogue de cette année. Ils le resteront jusqu’à la rentrée prochaine. Et dans un pays où le prix de vente moyen d’un smartphone est plus faible, ces modèles sont stratégiques. De notre avis, ce n’est clairement pas une bonne nouvelle pour Apple dont les ventes d’iPhone XS, XS Max et XR ne sont pas au rendez-vous.
Et cela jettera certainement un peu d’huile sur les bouillonnantes négociations qui ont lieu actuellement entre les deux firmes. Comme l’indiquait Steve Mollenkopf quelques jours avant le Qualcomm Tech Summit, la résolution de cette bataille économique se fera autour d’une table et non dans une cour de justice. Et cette victoire en Chine sera certainement citée par l’une ou l’autre des parties en présence. Ce qui ne va pas forcément faciliter la tâche des négociateurs…