Avec Motorola sous la main, Google avait certainement toutes les cartes en main pour bousculer l'ordre établi dans la téléphonie mobile : un constructeur pour développer d'excellents produits (les derniers Moto le prouvent), un système d'exploitation le plus utilisé partout dans le monde, une boutique d'applications et de contenus gigantesque et toute la légitimité dans les services Internet (Gmail, Drive, Maps, Search, YouTube). D'autant qu'au fur et à mesure des lancements, la ligne Nexus, animée par des partenaires extérieurs, s'est appuyée sur un segment alors balbutiant, mais qui allait devenir le fonds de commerce de marques comme OnePlus, Meizu, Honor ou Xiaomi : le rapport qualité-prix à son meilleur niveau.
Mais en 2014, Google a tout chamboulé. Motorola est vendu. L'activité hardware est réduite à quelques (géniales) expérimentations (Tango, Ara, Glass). Et plus question d?être le meilleur rapport qualité-prix. Le meilleur suffit. Avec le Nexus 6, Google fait en effet table rase de tout ou presque. Le groupe se sépare même d'une partie de la symbolique de la ligne Nexus : des smartphones de qualité, ouverts, pas très chers, offrant dignement le meilleur de l'expérience Android et destinés aux développeurs comme aux particuliers grâce à un form factor qui conviendra au plus grand nombre.
Un Nexus qui tire les performances et le prix vers le haut
Si la qualité reste de mise, comme nous le verrons tout au long de ce test, la taille et le prix, en revanche, ne sont plus du tout les mêmes. Au format phablette, ce mobile s'affiche à 649 euros (en 32 Go) sur le Play Store (et 600 euros en open market), avec une option à 50 euros pour doubler la capacité de stockage. C'est presque le prix d'un iPhone 6. Nous sommes loin des 350 euros du Nexus 5... Pour ce prix, vous avez naturellement une excellente plate-forme technique dont voici les éléments :
- Écran Amoled Quad HD de 5,9 pouces pour une résolution 493 points par pouce
- Chipset Qualcomm Snapdragon 805 (quad-core Krait 450) cadencé à 2,7 GHz
- Chipset graphique Qualcomm Adreno 420
- 3 Go de mémoire vive
- 32 ou 64 Go de stockage interne (non extensible)
- Batterie 3220 mAh, chargement sans fil intégré compatible Turbo Charge
- Capteur photo Sony Exmor IMX214 de 13 mégapixels avec optique ouvrant à f/2.0 et stabilisateur optique, compatible 4K en vidéo
- Webcam 2,1 mégapixels
- Compatible LTE catégorie 6, WiFi ac, Bluetooth 4.1, GPS, NFC
- Double haut-parleur à l'avant
- Android 5.0 Lollipop avec Google Now Launcher
- Poids : 184 grammes
- Epaisseur : 10,1 mm au plus épais
Peu de commentaires à faire sur cette configuration qui laisse rêveur. Cela n'est pas précisé officiellement, mais nous pensons qu'un verre Gorilla 3 assure la protection de la dalle tactile. Nous remarquons en outre une certaine similitude avec deux modèles. D'une part avec le Galaxy Note 4 de Samsung. La plate-forme technique des deux phablettes est très similaire pour une approche du produit qui l'est presque autant. Et d'autre part avec le dernier Moto X En fait, le Nexus 6 est au flagship de Motorola ce que le Galaxy Note 4 est au Galaxy S5 : une version XL plus musclée.
Un châssis signé Motorola jusque dans les boutons matériels
Et cela se vérifie dès la prise en main, car le châssis du Nexus 6 reprend les codes de la gamme Moto de 2014. À savoir ce double haut-parleur en façade (toujours l'un pour le multimédia et l'autre pour les appels téléphoniques) et la bordure inférieure extrêmement fine. Le placement des boutons matériels sur la tranche de droite. À l'arrière, le capteur 13 mégapixels entouré du « flash ring » (cet anneau qui dispose de deux petits flashs LED). En dessous de l?APN se trouve le logo de Motorola, toujours dans un espace concave. Le seul détail qui révèle que c'est un Nexus, c'est le nom de la gamme sous le logo du constructeur.
Les lignes sont les mêmes. Et les matériaux aussi. Nous retrouvons le même châssis métallique qui protège les tranches du smartphone, cerclage qui ne comprend pas la dalle de verre minéral qui protège l?écran tactile. Nous retrouvons la même plaque de polycarbonate à l'arrière pour loger certaines antennes. Et toujours la petite courbe formée entre le métal de la tranche et le plastique du capot (toujours inamovible). Sans oublier les connectiques que vous retrouverez aux mêmes endroits et le microSD qui brille toujours de son absence. Bref, le Nexus 6 est donc... un grand Moto X (2014).
La même prise en main, mais en plus grand
Et ce dernier est l'une de nos très bonnes surprises de ce second semestre. Pourquoi bouder notre plaisir en prenant en main cette version qui lui ressemble, mais où tout est proportionnellement plus grand ? Les sensations sont donc globalement les mêmes, puisque les matériaux et la construction du mobile restent inchangés. Il vous faudra juste une main en plus dans certains cas. Car passer de 5,2 pouces à 5,9 pouces n'est pas tout à fait anodin.
Il y a un détail qui n'est pas homothétique dans ce design : la taille des pixels. Car si le Moto X (2014) affichait une résolution de 423 pixels par pouce, le Nexus 6, lui, affiche 493 pixels par pouce pour une définition QHD. Nous ne dépassons pas les 500 pixels par pouce (comme le G3 ou le Droid Turbo), mais c'est déjà un excellent score. Cela offre un superbe grain à l'image et à l'interface. La précision et le contraste sont au rendez-vous. Les angles de vue sont ouverts, sans être exceptionnels pour autant. La technologie AMOLED offre de belles couleurs. La luminosité semble légèrement moindre. La dalle glisse tout autant que sur le Moto X (2014).
Première rencontre avec Lollipop
Une fois l?écran allumé, nous faisons connaissance avec Android 5.0 Lollipop, dont la séquence de paramétrage diffère d'Android 4.x (Ice Cream Sandwich, Jelly Bean et KitKat). Le Nexus 6 est le premier smartphone sous Lollipop testé par LesMobiles.com. Cela a des avantages, comme des défauts. Au-dessus de Lollipop, le smartphone est équipé de Google Now Launcher, le célèbre lanceur d'applications de la gamme Nexus, mais aussi des derniers Moto X, G et E. Vous retrouvez donc les applications Google présentent sur le bureau d'accueil et le Google Now sur l?écran de gauche. Nous sommes donc en terrain connu. Quelques subtilités sont cependant à découvrir. Des modifications qui sont autant le fait de Lollipop que de Google.
Menu application, menu paramètres et multitâche
La première est évident le Material Design. La majorité des icônes des applications Google a changé. De même pour les icônes système (touches de navigation et accès au menu des applications). En lieu et place du dossier Google, vous retrouvez trois dossiers cote à côté : Google (avec Maps, Google Plus, Agenda, YouTube, Hangouts, Gmail, Search, etc.), Créer (avec la suite bureautique née de la disparition d?Office Suite) et Play (avec toutes les applications Play, sauf le Play Store). Intéressant, Google n'a pas remplacé avec Hangouts son Messenger, lequel vient juste d?être mis à jour avec de nouvelles fonctions.
Paramétrage du ratio des photos, gestion de la sonnerie, nouveau clavier Lollipop
Des retouches qui sont aussi parfois fonctionnelles
Si l'ergonomie du menu d'applications, du multitâche, du menu paramètres et de la zone de notification a changé, leur fonctionnement reste identique. Seule la zone de paramétrage rapide a clairement évolué, devenant plus visuelle et plus riche. Vous remarquerez en haut trois icônes : la batterie pour accéder à un écran de visualisation de l'utilisation de la batterie, un écrou pour accéder plus rapidement aux paramètres complets et une icône bleue. Ce dernier sert à gérer les comptes du smartphone et d'activer le compte invité.
zone de paramétrage rapide, tableau de bord de la batterie et notification sur écran vérouillé
Autre nouveauté de Lollipop, l?écran de verrouillage est désormais bien plus interactif. Les notifications s'y affichent en grand et offre deux raccourcis permanents : balayez vers la gauche pour l?APN, comme c?était le cas avec KitKat, et balayez vers la droite pour le téléphone (rappelant qu'un smartphone, c'est aussi un téléphone...). En balayant vers le haut, vous débloquez le mobile. En balayant vers le bas, vous initiez une interaction avec les notifications : répondre à un mail, partager une photo, etc. L'interaction nécessitera bien sûr de débloquer le mobile pour la finaliser. Notez que la zone d'accès aux paramétrages rapides est aussi accessible depuis l?écran de verrouillage.
Nous voyons aussi dans ce smartphone l'influence de Motorola. D'abord le fait que le smartphone sort de veille si vous le prenez en main. C'est typique des Moto X. Ensuite, l?écoute permanente de Google Now qu'il suffit d'appeler avec une phrase clé. Ca aussi, c'est du Motorola.
La meilleure plate-forme technique jamais proposée ?
Presque tout nu, Lollipop, comme KitKat sur le Nexus 5, offre une impression de fluidité. Avec une telle plate-forme technique, les performances du smartphone sont naturellement au rendez-vous. Nous avons réalisé les tests habituels pour comparer le mobile avec ses pairs. Sur AnTuTu, le smartphone obtient 49 722 points, soit pratiquement le même score que le MX4. La différence avec le Note 4 est flagrante près de 2000 points à l'avantage du Nexus.
Sur 3DMark, le smartphone atteint 23 062 points, ici aussi largement au-dessus du Note 4 et du MX4. Vous remarquerez que le Nexus 6 surclasse donc le Note 4, pourtant doté du même chipset et de la même quantité de RAM. Nous attribuons cela à la présence de Touchwiz, toujours aussi pesant pour le smartphone. Autre remarque : si le MediaTek MT6595 du MX4 est plus performant sur les coeurs applicatifs, son réel défaut est le PowerVR qui se charge des graphismes. Étonnant que ce soit justement un PowerVR qui anime les iPhone... En moyenne, le Nexus 6 est donc le plus performant smartphone.
Capable de tout, encore faut-il qu'il soit compatible...
Cette puissante plate-forme, certainement la meilleure plate-forme jamais testée chez LesMobiles, maîtrise naturellement tous les usages usuels. Notamment le jeu vidéo. Une fois n'est pas coutume, nous avons fait nos tests sur Modern Combat 5, Dead Trigger 2 n?étant pas compatible avec le Nexus 6 (certainement à cause de Lollipop). Le FPS de GameLoft tourne ici comme un charme et tous les effets sont purement magnifiques. Le tout avec un écran QHD de 5,9 pouces, les joueurs devraient être ravis.
De même pour la vidéo : cet écran est superbe pour regarder des films. Nous vous conseillons simplement de télécharger un autre lecteur vidéo sur le Play Store, comme VLC, par exemple, car le lecteur par défaut (accessible depuis Photos...) n'est toujours pas capable de décoder facilement certains formats de fichiers, et encore moins les sous-titres ou les pistes audio éclectiques.
En photo, les mêmes défauts que le Moto X (2014)
En photo, le smartphone est moins impressionnant, même si les conditions de luminosité de nos tests n?étaient pas faciles. Nous avons choisi de prendre la photo le matin, car la lumière est belle et la météo clémente. Mais cela sous-entend aussi que les ombres des immeubles sont dominantes compte tenu de l'angle du soleil. Le résultat est bon (contraste, couleur, piqué, détail), mais sans être brillant. Difficile évidemment de faire la part des choses entre un ciel dégagé et lumineux et la rue ombragée. Le capteur fera son choix, mais il sera tranché et non équilibré.
Photo prise avec le Nexus 6
L'accès au réglage de l'exposition manuelle aurait pu être une bonne idée pour contrebalancer. Mais comment savoir à l'avance quel parti pris le capteur prendra ? Ceci dit, l'application Google Camera, préinstallée ici, n'est toujours pas la meilleure qui soit, loin de là. Elle est certes simple à prendre en main et rapide à capturer les clichés, mais ce sont bien là ses seuls atouts. Notamment vis-à-vis de Sony qui fait largement mieux dans le domaine.
Réglage de l'exposition manuel
Le meilleur Motorola, oui, mais est-il vraiment le meilleur Nexus ?
En conclusion, le Nexus 6 est clairement le meilleur Motorola jamais proposé en France (le Moto Maxx n?étant pas prévu chez nous à l?heure où nous écrivons ces lignes) et serait même capable de détrôner le Note 4 sur le segment des phablettes (au moins techniquement), tant la proposition logicielle est ici plus claire, plus limpide, plus honnête (pas de faux-semblant, ni de ficelles marketing). Notamment dans ses intentions. Les quelques petites touches de Motorola, qui nous rappellent tout le travail fourni sur la gamme Moto depuis plus d'un an, subliment la justesse de l'interface Google Now Launcher. Encore une fois, impossible de ne pas se poser la question sur l'intérêt des surcouches, même si certaines sont très appréciables (comme HTC Sense, Xperia UI, Optimus UI et même Touchwiz dans une certaine mesure).
Cependant, nous nous posons toujours la question du positionnement du Nexus 6 vis-à-vis de ses prédécesseurs. Smartphone haut de gamme exubérant, dans la puissance, dans la taille et dans son prix, il est à l'opposé de l'accessibilité (dans tous les sens du terme) du Nexus 5, qui n'en est pourtant pas moins élégant et charmant. Un discours qui ressemble d'ailleurs plus à celui de Motorola au lancement du premier Moto X quà celui de Google il y a encore un an. Et cela risque certainement, plus encore que les 600 euros demandés pour son acquisition, de heurter les fans de la gamme.