Tout savoir sur : Linshof : aussi éphémère qu’une étoile filante
Il y a trois semaines, nous rapportions dans nos colonnes l’existence d’une jeune entreprise allemande lancée dans la téléphonie mobile : Linshof. Son but était alors de développer un smartphone haut de gamme commercialisé à un prix d’ami. Pour se différencier, l’entreprise comptait sur un smartphone au design très différent des habitudes (un format octogonal) et à l’interface particulièrement travaillée (les premiers éléments visuels faisaient penser au Magazine UX de Samsung). Moins d’un mois plus tard, l’entreprise met finalement la clé sous la porte. À l’écriture de notre article, nous estimions qu’il était difficile de s’improviser constructeur de smartphones du jour au lendemain et que Linshof aurait pu être une exception. Ce ne sera donc pas le cas.
Laché par ses investisseurs
La raison officiellement évoquée pour expliquer cette fermeture soudaine serait une défection des investisseurs qui auraient simplement coupé les vivres de la start-up. Aucun détail sur les motivations de ces derniers quant à l’abandon d’un projet dans lequel ils ont placé leur argent. Car, pour eux, cela se solde sur une perte nette. Heureusement, Linshof ne laisse pas d’ardoise derrière elle, l’entreprise expliquant que toutes ses créances ont été payées et qu’aucune précommande n’a été acceptée. Bref, il n’y a apparemment pas de victimes à déplorer, outre les salariés qui ont perdu leur emploi.
Mais tout n’est pas aussi simple. Car Linshof n’a pas bonne presse outre-Rhin. Les médias allemands ont en effet révélé que les fondateurs de la start-up ont été soupçonnés de fraude. Le brouillard persistant autour de la nature exacte de l’entreprise (son statut, ses partenaires, ses investisseurs, ses moyens) a clairement créé un climat suspicieux, alourdi par quelques détails troublants.
La différence fait-elle vraiment vendre des mobiles ?
Nous nous posons évidemment des questions sur cette histoire. Sans évoquer l’aspect répréhensible, lequel n’est aujourd’hui pas avéré judiciairement, le fait de développer un smartphone sur le même segment que les spécialistes chinois du rapport qualité-prix (OnePlus, Meizu, Honor) avec une proposition vraiment différente était peut-être trop ambitieux.
Peut-on aujourd’hui raisonnablement espérer concevoir en Europe un produit mobile qui sorte des lignes conventionnelles ? Que ce soit bq, Mobiwire, Kazam, Wiko, Archos ou encore Yezz, ces marques ont des difficultés à sortir du lot, car le risque financier est peut-être trop lourd à porter pour une petite société débutant sur un marché extrêmement compétitif. D’autant que les prix ont été tirés vers le bas en 2013 et 2014 par un leader mondial en grande difficulté et cherchant à maintenir ses parts de marché. C'est bien connu : les smartphones de couleurs sont très jolis sur les étals, mais le consommateur partira toujours avec une boîte noire ou blanche.
Haut de gamme à 310 euros
Pour rappel, le Linshof i8 aurait dû être un smartphone avec un écran Full HD de 5 pouces, un chipset octo-core cadencé à 2,1 MHz (peut-être un MT6795 de MediaTek), 3 Go de RAM, 80 Go de stockage interne (répartis en deux barrettes de 64 Go et 16 Go), un capteur photo Sony 13 mégapixels à l’arrière, une webcam grand-angle 8 mégapixels à l’avant, une batterie 3100 mAh et Android Lollipop habillé d’une interface appelée Linshof UI. Le tout pour 380 dollars, soit 310 euros environ. Dommage, nous ne le verrons jamais.