En tout début de semaine, nous avons relayé une fuite qui semblait indiquer que Samsung serait intéressé par un rapprochement avec BlackBerry. L’article émanait de Reuters qui tenait ses informations d’une source confidentielle, mais sûre. L’opération, qui visait à valoriser BlackBerry environ 7,5 milliards de dollars, a tout de suite été démentie par le constructeur canadien, puis quelques jours plus tard par Samsung. Une déclaration officielle de J.K. Shin, le patron de Samsung Mobile, envoyée à nos confrères du Wall Street Journal, allait dans le sens de BlackBerry, expliquant que les deux entreprises sont partenaires et ont conclu un accord commercial autour des solutions pour les entreprises. Or, tout n’est pas aussi simple, car il semble que la déclaration de J.K. Shin n'avait pas pour but de démentir, juste d'endormir le poisson.
Samsung serait bien interessé par BlackBerry
Une nouvelle fuite, en provenance cette fois-ci du quotidien économique canadien Financial Post, révèle d’autres informations. Le périodique a eu accès à certains documents qui confirment les déclarations initiales de Reuters. Mieux, elle va encore plus loin. Les documents ont été écrits par la banque d’investissement new-yorkaise Evercore Partners pour le compte de Samsung. Ils ont été édités au quatrième trimestre 2014 et étudient les différents scénarios de rapprochement entre les deux entreprises (rachat total, participation majoritaire ou minoritaire), ainsi que le potentiel développement de l’entreprise suite à la restructuration initiée par John Chen, l’actuel patron du constructeur canadien.
La source qui a divulgué ces documents explique que Samsung était intéressé par un rachat, mais que la banque d’investissement préconisait une prise de participation minoritaire pour éviter les complications liées aux technologies sensibles de BlackBerry, notamment au niveau des informations sensibles des agences gouvernementales qui utilisent BlackBerry. La valorisation de BlackBerry annoncée par Reuters serait confirmée : entre 7 et 8 milliards de dollars.
BlackBerry a appris le montant dans les colonnes de Reuters
La source révèle également que BlackBerry a appris l’existence de cette offre de rachat lors de la publication originale de l’article de Reuters. Ils n’étaient donc pas totalement au courant du montant. Et c’était d’ailleurs un levier de négociation pour Samsung qui s’est retrouvé avec l’herbe coupée sous les pieds. En effet, le géant coréen souhaitait réaliser cette offre sans que BlackBerry ou les marchés financiers l’apprennent. Car, cela aurait eu un effet considérable sur la valorisation boursière de l’entreprise. Ce qui a effectivement été le cas.
Avant la publication de l’article de Reuters, l’action BlackBerry s’échangeait à 9,7 dollars. Samsung en proposait près de 15 dollars. Ce qui aurait convaincu les actionnaires. Or, l’action a quasiment atteint les 13 dollars depuis. Le prix offert par Samsung était alors plus difficile à défendre. De plus, selon le rapport d’Evercore Partners, Samsung ne souhaitait pas dévoiler son jeu pour ne pas éveiller les soupçons sur le potentiel de BlackBerry.
Une négociation qui tourne mal pour Samsung
En effet, la banque d’investissement expliquait que le chiffre d’affaires de BlackBerry resterait d’ici 2017 le même côté hardware, mais triplerait côté software, passant de 235 millions à 636 millions de dollars en 3 ans. Des chiffres que John Chen doit également connaître : dans sa déclaration de lundi, BlackBerry affirme que son potentiel de développement sera meilleur si l’entreprise reste indépendante. Un double message : le constructeur connaît sa valeur et les négociations ne seront pas aussi faciles qu’espérées.
D'où la déclaration de Samsung hier. Le but était de nier la situation, afin de faire croire à BlackBerry (et aux marchés financiers) qu'il ne s'agissait pas là de sa proposition, même si c'était vrai. Car une fois le jeu de Samsung dévoilé, il aurait été difficile de négocier. Selon la source du Financial Post, Samsung serait toujours intéressé par racheter tout ou partie de BlackBerry au prix le plus juste. Reste à savoir ce que chaque partie entend par « prix le plus juste ».