La publicité audiovisuelle est clairement en retard vis-à-vis des possibilités offertes par l’exploitation des données personnelles des spectateurs. Sur Internet, les bannières et les annonces publicitaires s’affichent en fonction de nombreux critères : les mots-clés saisis, l’historique de navigation, la localisation de l’adresse IP, quelques informations en provenance des réseaux sociaux, le support sur lequel l’Internaute surfe, etc. Mais à la télévision, c’est encore du broadcast, comme à l’époque du hertzien analogique. Et le constat est quasiment le même avec les services de VOD ou de catch-up TV. Un retard qui s’étend même aux publicités vidéos sur YouTube, sur Spotify ou même les jeux freemium.
Bientôt des pub TV affichées en fonction de vos préférences
Une publicité TV qui dépend de vous ?
Google, peut-être l’entreprise dépendante le plus au monde de la publicité et de son efficacité, souhaite développer une plate-forme audiovisuelle capable d’afficher en temps réel une publicité vidéo en fonction de critères de sélection. L’information a été révélée en fin de semaine dernière par l’hebdomadaire en ligne Adweek. L’expérimentation, prévue sur le début de cette année, est localisée à Kansas City, l’une des villes américaines où Google opère son service Google Fiber (accès à Internet et télévision enrichie sur la fibre optique).
Le système est assez simple. Chaque foyer disposant d’un décodeur Google Fiber Box analyse le comportement des auditeurs de façon permanente, emmagasinant des informations personnelles dans un profil qualifié. Parmi ces informations, les temps de visionnage, les chaînes regardées, le type de programme préféré, etc. Sans oublier la zone géographique afin d’affiner sur les zones de chalandise. En fonction des critères de sélection de l’annonceur, la publicité apparaîtra à l’écran dans certains foyers, et pas chez d’autres.
Une double révolution pour les annonceurs, les networks...
Évidemment, pour Google, il y a un double bénéfice. D’abord, les annonceurs publicitaires paieront plus cher pour diffuser une publicité à un public qui a plus de probabilité d’être concerné (car tout cela reste basé sur des statistiques...). Il risque même d’y avoir un changement considérable à prévoir, non seulement sur la façon de vendre de la publicité (non plus à la seconde de diffusion, mais au spot visionné), mais aussi sur les régies capables de vendre des publicités. TF1 sera-t-il toujours attirant pour une marque quand Google est capable d’être plus efficace ? Pas sûr. Notez que les publicités s’afficheront sur tous les programmes : live, catch-up et émissions enregistrées sur le disque dur. Pas de jaloux. Pas de perte d’audience non plus.
... mais aussi pour les instituts d'étude
Second bénéfice, les annonceurs et les chaînes elles-mêmes gagneront un nouvel outil de contrôle et de mesure de l’audience sur les spots et les programmes. Si aujourd’hui les calculs d’audience sont réalisés à partir d’un échantillon représentatif de spectateurs équipés d’un boîtier, Google Fiber réalise une étude en temps réel sur l’ensemble de ses clients. C’est autre chose. Qu’en sera-t-il des Mediamétrie et autres Nielsen avec un tel outil ?
Et pour l’usager ? C’est son temps qui est vendu par Google. Quel contrôle a-t-il désormais ? Deux points sont importants. D’abord, les annonces publicitaires sont ciblées. Les conventions obsèques proposées à de jeunes mariés, ce n’était évidemment pas top. Il y aura donc un bénéfice consommateur. Ensuite, l’usager a la possibilité de paramétrer son compte pour que la publicité ne soit plus ciblée. Un opt-out important.
Aujourd'hui la télévision. Demain la téléphonie ?
Cette expérimentation est importante, même pour nous mobinautes. Car, si elle concerne aujourd’hui la télévision, le modèle publicitaire pourrait demain être appliqué aux annonces publicitaires vidéo sur Internet et dans les applications. Aujourd’hui, sur YouTube, le ciblage est encore incomplet. De même dans les jeux freemium. Mais une vraie régie publicitaire dédiée à cela et développée par Google pourrait être en mesure d’en profiter.