Oppo est l'une de ces marques chinoises longtemps restées inaccessibles pour le consommateur européen. Grâce à quelques importateurs et une traduction en une vingtaine de langues, l'achat d'un smartphone de cette marque encore très connotée « geek et technophile averti » n'est désormais plus un parcours du combattant. Bien sûr, Oppo aurait pu faire comme certaines marques concurrentes telles Gionee et effacer sa marque au profit d'une autre pour accéder à des marchés internationaux.
Mais non. Convaincue de son destin mondial, à l'image de OnePlus dont le cofondateur, Pete Lau, est son ancien vice-président, l'entreprise est restée droite dans ses bottes. La présence entre nos mains du R5 est certainement une conséquence de cet acharnement payant.
Presque la fiche technique d'un Galaxy A7
Même si son remplaçant, le R7, devrait être présenté dans les prochaines semaines en Chine, le R5, sorti en décembre dernier, est un modèle très intéressant, même aujourd?hui. D'abord, il n'a pas la prétention de rivaliser avec les smartphones haut de gamme et performants. Il se veut être un produit milieu de gamme chic (vendu à 400 euros environ), où l'esthétique (autant matérielle que logicielle, comme nous le verrons) est exacerbée, sans pour autant totalement sacrifier toute la puissance brute. La preuve en est avec cette fiche technique :
- dimension : 148,9 x 74,5 x 4,9 mm
- poids : 155 grammes
- ratio écran / taille : 67,5 %
- écran Amoled Full HD de 5,2 pouces (résolution de 423 points par pouce)
- protection d?écran en verre Gorilla 3 de Corning
- chipset Qualcomm Snapdragon 615 octo-core (premier quad-core Cortex-A53 cadencé à 1,7 GHz, second quad-core Cortex-A53 cadencé à 1 GHz, GPU Adreno 405)
- 2 Go de mémoire vive
- 16 Go de stockage interne (sans extension)
- batterie 2000 mAh non amovible
- capteur photo principal 13 mégapixels rétroéclairé signé Sony (IMX 214), compatible 1080p en vidéo (ralenti à 120 images par seconde en 720p). Flash LED. Objectif ouvrant à f/2.0.
- webcam 5 mégapixels grand-angle (83°) avec objectif ouvrant aussi à f/2.0.
- compatible WiFi n dual-band, Bluetooth 4.0, GPS Glonass et LTE catégorie 4
- système d'exploitation : ColorOS 2.0.1 sur une base Android 4.4.4 KitKat
- un seul port carte SIM
- vendu avec adaptateur microUSB vers jack 3,5 mm
Par la présence du Snapdragon 615, le R5 se positionne d'emblée comme un concurrent des HTC Desire 820 et M8s, du Samsung Galaxy A7, du Xperia M4 Aqua de Sony, du récent Mi 4i de Xiaomi, des Blade S6 et Nubia Z9 Mini de ZTE, ou encore de l?Archos 50 Diamond. Du beau monde, mais beaucoup de phablettes dans cet ensemble. Le Galaxy A7 semble être son principal adversaire compte tenu de son positionnement. Et nous regrettons d'emblée l'absence de port microSD. Voire même la petitesse de la batterie...
Un produit charmant
Ce qui choque au premier regard, c'est évidemment l'extrême finesse du smartphone. Il s'agit de l'un des plus fins au monde : 4,85 mm. Un record qui est depuis tombé, mais une très belle performance tout de même. Notez qu?Oppo n'est pas parvenu à offrir une optique décente dans un châssis si fin : d'où la protubérance du capteur photo. Cependant, si Apple et Samsung le font avec des mobiles vendus à 700 euros, pourquoi pas Oppo ?
Outre ce détail, le Oppo R5 est un smartphone presque comme les autres, avec un design particulièrement rectiligne, à l'avant comme à l'arrière. Nous retrouvons une belle dalle de 5,2 pouces derrière un verre Gorilla 3 de Corning que nous pourrions qualifier de 2.5D (un peu comme l'iPhone 6). Sous l?écran, une zone tactile avec les boutons de navigation Android. Détails amusants : les bordures latérales autour de la dalle Amoled sont presque aussi épaisses que le mobile. C'est plutôt rare... À l'arrière, rien de bien différent d'autres smartphones. Pas d'aluminium à l'arrière semble-t-il, mais un revêtement en polycarbonate qui disperse très bien la chaleur (une condition importante avec un châssis si fin) et qui ne marque pas.
Sa finesse ne passe pas inaperçue
Les tranches, bordées de métal, en revanche sont assez étonnantes. Si la position des boutons matériels est classique (situés à hauteur du pouce de la main droite), d'autres éléments ont été déplacés. C'est notamment le cas du tiroir pour la carte SIM, perdu dans un coin. C'est aussi le cas du port jack 3,5 mm qui a totalement disparu, conséquence de la finesse du smartphone. Heureusement, l?Oppo R5 est livré avec un adaptateur qui transforme le port microUSB en connecteur standard pour brancher un casque (comme celui présent dans la boite). Vous vous demandez aussi peut-être où se trouve le haut-parleur : il est en fait fusionné avec l?écouteur téléphonique. Et cela aura quelques conséquences...
Le modèle reçu en prêt à la rédaction est très ostentatoire : robe totalement blanche à l'avant et à l'arrière surmontée sur les tranches par un renfort doré. Le même traitement est réservé au capteur photo protubérant dans le coin supérieur gauche. Le logo de la marque, juste en dessous, est imprimé dans la même couleur. Si ça, ce n'est pas « bling-bling », qu'est ce que c'est ? Sachez qu'il existe aussi une version argent un peu moins tape-à-l'oeil.
Une prise en main moins franche
L'extrême finesse du smartphone à quatre conséquences directes. La première est une prise en main qui manque clairement de fermeté. Avec la surface lisse appliquée à l'arrière, le smartphone est fuyant. De plus, la largeur et la hauteur du mobile (compte tenu de ses larges bordures) ne facilitent pas la manipulation. En gros, il est plus beau que manipulable. Seconde conséquence de l?épaisseur, le smartphone entre parfaitement bien dans une poche, et ce, malgré la protubérance du capteur photo.
Troisième conséquence, le mobile chauffe plus rapidement, mais grâce à la coque en polycarbonate, cela ne gêne que lorsque le Snapdragon 615 est trop sollicité (en jeu par exemple). Enfin, compte tenu du triple emploi du port microUSB (charge, transfert de données et port casque), il est impossible d?écouter de la musique en chargeant le mobile, par exemple. Pour éviter cela, il existe bien sûr les casques Bluetooth. Mais vous risqueriez alors de grever la batterie. Ce qui n'est évidemment pas ce que vous recherchez.
Malgré tout la construction du smartphone est très qualitative. Une impression renforcée par le bel écran Amoled. La résolution est bonne, le contraste est profond, le grain très fin et les couleurs vibrantes. La luminosité est suffisante, même réglée à la moitié de sa puissance maximale. Les angles de vision sont bien ouverts. Et la dalle de Gorilla 3 glisse très bien sous les doigts. L'ensemble participe clairement à la qualité visuelle du produit.
ColorOS : une ROM Android raffinée
Comme nous l'avons indiqué précédemment, le R5 est d'abord un beau produit avant d?être un bon produit. Une qualification qui touche aussi bien les atours physiques (châssis, écran), comme nous venons de le voir, que logiciels. ColorOS, que nous testons ici pour la première fois dans nos colonnes, est une ROM alternative comparable à celles de Huawei, de Meizu ou d?Infinix. ColorOS, ici basé sur KitKat, est visuellement l'une des versions d'Android les plus travaillées du marché. Si son ergonomie « à la chinoise » est loin d?être révolutionnaire (absence du menu applications, découpage des paramètres par catégorie, boutique de thèmes, etc.) elle propose son lot de petites surprises.
Interface globales de ColorOS
La première est clairement l?écran dédié à la musique. Cet écran se trouve à gauche du bureau d'accueil de ColorOS (à la place de Google Now dans les Nexus, de Blinkfeed chez HTC ou de Magazine UX chez Samsung). Vous y trouvez d'abord un widget géant en forme de platine vinyle qui sert à contrôler la musique. Déplacez le bras de la platine sur le disque virtuel et la playlist active se lance. Sur cet écran, vous voyez trois icônes en bas : il s'agit de raccourcis. Le premier amène à l'application téléphone. Le second au lecteur audio (pour choisir et modifier les playlists). Le dernier fait apparaître quatre raccourcis personnalisables. Nous y avons par exemple rajouté Gmail.
L'écran dédié à la musique
Seconde bonne surprise : le charme des icônes. Alors que certaines surcouches manquent clairement de finesse ou même d'originalité dans son iconographie, celle de ColorOS est juste classe, tout en restant explicite. Même si ColorOS ne révolutionne pas la prise en main d'Android (et ce n'est certainement pas ce que nous lui demandons), l'aspect visuel est encore une fois mis en valeur. Cela se ressent aussi avec le fond d?écran animé associé à la météo. Pourquoi avoir besoin d'un widget quand les gouttes de pluie peuvent perler sur l'ensemble de l'interface et éclabousser les icônes ? Oppo a également soigné les effets visuels lors de la sortie de veille du smartphone, la gestion du multitâche ou encore l?écran de personnalisation de l'interface.
Personnalisation de l'interface avec papier peint qui change selon la météo
Comme toute ROM chinoise qui se respecte, les applications système ont toutes été modifiées. Du gestionnaire de contacts à celui de la messagerie, en passant par les paramètres, la musique, la galerie photo (séparée du lecteur vidéo) ou l?horloge. Les captures d?écran de certaines d'entre elles accompagnent cet article. Parmi les applications additionnelles, notez la présence de deux outils de sauvegarde (un en local et un sur le Cloud), un explorateur de fichiers et un centre de sécurité (qui offre plus d'outils d'optimisation et de nettoyage que des barrières antiintrusion). Complétez cela avec la suite Google Play et deux logiciels tiers (Kingsoft Office et WeChat) pour finir le tour du propriétaire. Notez l'absence totale d'une boutique applicative alternative à celle du Play Store.
Centre de sécurité et explorateur de fichiers
Une plate-forme technique moins belle que l'interface
Cette belle interface est servie par une plate-forme milieu de gamme axée sur le Snapdragon 615 qui apporte fluidité et réactivité. Les scores obtenus par le R5 sont très proches des mobiles disposant de la même configuration, sans bonne ni mauvaise surprise. Le mobile atteint quasiment 28 000 points sur AnTuTu, un peu en dessous donc du haut de gamme de 2013 (sous Snapdragon 600 et 800). Sur 3DMark, le smartphone dépasse les 8000 points. Et sur Basemark OS, il parvient à 733 points. Sur AnTuTu Video, le Oppo R5 atteint 475 points, ce qui, dans la nouvelle version de ce test, n'est pas très bon. Sur les trente formats testés, seuls, 10 passent normalement et 18 ne sont pas reconnus.
AnTuTu, 3DMark et Basemark OS II
Nous sommes donc globalement au-dessus du Kirin 620 et du Snapdragon 410, ce qui est logique. Mais nous sommes aussi sous le MediaTek MT6752 (Acer Liquid Jade S, Vitamin A, Meizu m1 note) au niveau des performances des coeurs applicatifs (et au-dessus pour les performances graphiques). Preuve encore, si nous en avions besoin, du déséquilibre de la plate-forme SD615 qui offre d'assez bonnes performances graphiques, mais qui manque de peps au niveau des coeurs applicatifs.
Un très mauvais résultat sur AnTuTu Video
Ce n'est pas la 3D qui lui fait peur !
À l'usage, nous disposons donc d'une plate-forme capable d'offrir une réactivité largement suffisante pour les tâches quotidiennes. Mais qu'en est-il du multimédia ? Car, c'est évidemment ce genre d'usage qui consomme beaucoup de ressource. En jeu vidéo, avec Dead Trigger 2, l?Oppo R5 se trouve être une bonne plate-forme. Poussés à leur maximum, les graphismes du jeu n'engendrent pas de ralentissements. Ce sont en revanche, les phases de chargement qui en provoquent. Signe que les coeurs Cortex-A53 surcadencés ne suffisent pas toujours. Notez également que la finesse du produit n'est pas appropriée à une prise en main pour jouer.
Côté film, le score assez faible obtenu sur AnTuTu Video démontre que le smartphone d?Oppo n'est pas tout à fait à l'aise avec cet usage. Le lecteur offert ici est compatible DTS, ce qui est une très bonne nouvelle, mais ne décode pas les sous-titres. Dommage, l?écran est grand et le rétroéclairage Amoled offre de belles couleurs à l'ensemble. Nous avons donc deux conseils : d'abord, téléchargez un lecteur audiovisuel alternatif comme VLC afin d?étendre la compatibilité du smartphone. Ensuite, regardez vos vidéos avec un casque, le haut-parleur natif n?étant pas très qualitatif.
Pas de sous-titre, mais le support du son DTS
Un APN très correct qui plaira aux experts
Enfin la photo. Comparez au N1, le R5 ne devrait pas être le choix de ceux qui cherchent un APN d'appoint. Pourtant, le résultat est très convenable. Si, en mode automatique, ils manquent clairement de piqué, les clichés fournis par le capteur 13 mégapixels sont détaillés. Il faut dire que les conditions de test ont été compliquées : en cet après-midi d'avril, le ciel parisien est chargé de pluie. La luminosité est donc diffuse. Arriver à proposer quelques détails dans les nuages sans pour autant assombrir les rues est un bon résultat, même si, c'est vrai, il manque du contraste.
Photo prise avec l'Oppo R5
L'interface photo est à première vue simple, voire même vide de paramétrage. Ce qui nous a déçus. Mais, si vous tirez la petite petite flèche à côté du déclencheur, vous obtenez l'accès aux différents modes de prise de vue, dont un mode expert avec contrôle de la balance des blancs, de la compensation de l'exposition, de la vitesse d'obturation, de l'ISO et de la distance focale. Une vraie belle surprise. D'autant qu'il est possible d'ajouter de nouveaux modes, comme sur les Galaxy et le Xperia. Une douzaine de modes additionnels sont proposés.
Un bonne alternative à la gamme Galaxy A de Samsung
Avec le R5, Oppo est droit dans ses bottes. La promesse de départ ? Proposer une alternative élégante aux smartphones qui mise plus sur la beauté que sur la puissance, à l'image de la série Galaxy A de Samsung. Et effectivement, le mobile manque un peu de puissance, mais s'appuie sur des prestations premium. Si le A5 est proposé avec un Snapdragon 410 trop peu énergique, le A7 offre la même plate-forme que ce R5, avec un écran légèrement plus grand. Ce sont donc deux adversaires pratiquement équivalents. Mais le prix public conseillé est quelque peu différent : 400 euros pour le Chinois, 500 euros pour le Coréen.
Nous connaissons les grandes forces du Galaxy A7 : belle finition métallique, bel écran Super Amoled, belle qualité photographique, une plate-forme multimédia parmi les meilleures et une interface Touchwiz qui comble les amateurs du genre. En face, des prestations presque équivalentes : tranches métalliques, verre renforcé, écran Amoled, belle interface, de bonnes qualités en photo, mais un lecteur multimédia incompétent. Mais ce défaut est largement rattrapable par le Play Store. Reste la batterie peut-être un peu juste et l'absence de port microSD. Peut-être donnerions nous l'avantage à Oppo, malgré ces défauts.