Un jour, votre pull vous dira que vous avez clairement de la fièvre (et que ce n’est pas simplement l’effet du soleil de ce début du mois de juin). Si cela vous paraît être encore de la science-fiction, c’est pourtant ce vers quoi tend le projet Jacquard, un développement en cours chez ATAP, la division hétéroclite de chez Google.
Le but de ce projet est de créer des vêtements interactifs qui intègreraient dans la fibre des éléments techniques, comme une surface tactile, des fils pour conduire l’information et des capteurs divers et variés (les mêmes que vous trouvez aujourd’hui dans les accessoires connectés type bracelet, montre ou lunettes).
Une surface tactile est ajoutée dans la manche de cette veste
Une technologie moderne. Une technique ancestrale.
Le nom du projet est d’ailleurs un bon indice de ce vers quoi Google tente d’aller. Pour ceux qui ne le savent pas, un petit prélude s’impose : le Jacquard est un métier à tisser mis au point par l’inventeur lyonnais Joseph Marie Jacquard en 1801. Ce métier à tisser, qui combine plusieurs technologies avant-gardistes pour l’époque, a la particularité d’être «programmable» : chaque travail à accomplir est codé sur une carte perforée qui guide les crochets et les chaînes pour réaliser des motifs complexes, comme le brocart ou le damas. Le métier Jacquard (ou une version plus moderne) est toujours utilisé aujourd’hui.
Le projet de Google est donc lié au tissage des vêtements, mais pas uniquement. L’idée est de créer une fibre capable d’intégrer des éléments technologiques et de le tisser, avec des fibres traditionnels de façon à créer un vêtement interactif en imitant la structure d'un écran tactile tel que celui de nos smartphones. L’une des particularités de cette fibre serait d’être tactile multipoints. L’autre serait d’être capable de transporter de l’information et de l’énergie pour fonctionner.
La miniaturisation à outrance
Une fois ce matériau développé, inutile de créer des machines à tisser spécifiques : les techniques de tissage actuelles s’y adaptent parfaitement. Dans la vidéo ci-dessous, vous verrez que Google a conduit quelques expérimentations au Japon où le matériau conducteur, totalement intégré dans le vêtement peut-être totalement invisible, ou faire partie du motif.
Dernière étape, il faut embarquer les technologies nécessaires pour l’interprétation des signaux, pour envoyer et recevoir des informations et pour alimenter l’ensemble. L’équipe d’ATAP est pratiquement capable de cacher cet ensemble dans des boutons ou des parures. Demain, cela sera directement implanté dans la fibre textile. Les premiers résultats de ces travaux ont été présentés lors du Google I/O qui a eu lieu la semaine dernière. Le textile qui y était présent intégrait des fils conducteurs intégrés aux motifs. L’ensemble répondait parfaitement aux sollicitations et était capable, comme un écran capacitif, de repérer plusieurs doigts en même temps.
Beaucoup plus ambitieux que le marché des mobiles et des accessoires
Le projet Jacquard, auquel participent plusieurs fabricants de vêtements, comme Levi Strauss & Co, pourrait sembler empirique, car l’ambition de Google est évidemment d’adresser l’ensemble de l’industrie textile dans le monde. Et quand nous parlons de vêtements, nous parlons d’un marché considérablement grand où tous les processus sont industrialisés.
Aux États unis, le marché vestimentaire représente 19 milliards de pièces vendues par an, soit plus de 150 fois le volume de smartphones vendus outre-Atlantique sur la même période. Le potentiel est donc considérable. Mais imaginez qu’un vêtement puisse vous offrir des informations sur votre santé physique et les transmettre directement à votre médecin grâce à votre smartphone. Voilà que cela devient un projet d’intérêt général.