Bientôt plus d’applications Google préinstallées dans Android en Russie ?

La justice russe a déclaré que Google abuse de sa position dominante dans Android. La firme a un mois pour modifier les règles d’utilisation du Play Store par les fabricants de smartphones, notamment l’installation systématique de la suite Play Services, Google Search inclus.

La Rédac LesMobiles - publié le 06/10/2015 à 11h30

Voici un nouveau volet de la guerre déclarée entre le gouvernement russe et les géants américains du Net, notamment Google. Alors que l’information porte évidemment à sourire, il pourrait s’agir aussi du premier pas vers une modification à long terme des règles imposées aux fabricants de smartphones vis-à-vis de la présence systématique des logiciels de la suite Play Services, laquelle inclut notamment Google Search. C’est Kirt MacMaster de Cyanogen, premier militant anti-Google, qui doit s’en réjouir...

Abus de position dominante

Quelle est donc cette information ? L’agence fédérale russe de protection de la concurrence, la toute puissante FAS, a émis une ordonnance hier dans laquelle elle déclare que la pratique de Google vis-à-vis d’Android porte atteinte à loi sur la protection de la concurrence. La firme américaine abuserait en effet de sa position dominante et empêcherait l’installation dans le système d’exploitation de solutions concurrentes. Dans cette ordonnance, la FAS impose à Google un ultimatum qui court jusqu’au 18 novembre prochain. Et les règles sont non seulement strictes, mais révolutionnaires.

Tout d’abord, les constructeurs des mobiles vendus en Russie ne seront plus dans l’obligation de choisir Google Search comme moteur de recherche pas défaut (notamment avec Chrome). Son widget ne sera pas préinstallé et d’autres moteurs concurrents pourront être proposés. Ensuite, ils ne seront plus obligés de préinstaller toute la suite Play Services et de placer les icônes de cette suite sur l’écran d’accueil du smartphone s’il souhaite tirer avantage du Play Store. Les applications préinstallées seront en outre désactivables. Enfin, Google devra accepter que les fabricants puissent installer des applications concurrentes (comme d’autres boutiques applicatives). Évidemment, ces règles restrictives pourraient faire boule de neige : l’Inde, l’Union européenne et même la FTC américaine enquêtent également sur des faits similaires.

Propagande, protectionisme...

Toute cette histoire en Russie tire son origine d’une plainte déposée en février dernier par Yandex, le moteur de recherche local dont la part sur son marché domestique se réduit comme peau de chagrin, Android y animant près de 95% des téléphones. En outre, l’audience de sa boutique applicative est anecdotique. Parallèlement à cette plainte, le ministre russe de la Communication, Nikolai Nikiforov, déclarait officiellement qu’Android n'était pas vraiment open source et que Google exerce une emprise inacceptable sur Android.

Une situation qui a abouti dans un premier temps à la volonté du gouvernement russe de développer son propre système d’exploitation grâce à d’hypothétiques fonds émanant d’un partenariat international entre la Russie, le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Afrique du Sud. Le maître d’oeuvre devait alors être Jolla. Ce n’est que dans un second temps que la Russie a signé un partenariat avec Jolla, après avoir écarté Samsung et Tizen. Le but est alors de créer une version de Sailfish OS pour les YotaPhone utilisés par les officiels et les membres de l’armée.

... revanche d'un mauvais perdant ?

À la lumière de ces événements, le rapprochement de Jolla et de Yandex pour livrer une boutique d’applications Android à Sailfish OS (et donc aux usagers du Jolla Phone et de la Jolla Tablet) n’est pas une coïncidence. Si les développeurs finlandais n’ont certainement jamais souhaité devenir un outil de propagande, ils le sont malheureusement aujourd’hui de fait. Ce qui ne sera certainement pas très bon pour signer des partenariats avec des constructeurs tiers hors des frontières russes.

Évidemment, cette décision est éminemment politique : elle est faite tout simplement pour redonner de la visibilité à Yandex, principale victime du succès d’Android en Russie, afin qu’il redevienne un acteur « incontournable » sur son marché domestique avec son moteur de recherche et sa boutique applicative. Cependant, même si Google accepte de donner du lest aux constructeurs de smartphones, rien n’affirme que ces derniers choisiront de tourner le dos à la firme de Moutain View ou à ses outils. Car les partenariats technologiques avec Google sont souvent de bonnes opportunités commerciales (demandez à LG par exemple).

Les constructeurs suivront-ils vraiment

Et c’est bien là la faiblesse du système : la FAS russe impose à Google de casser les obligations contractuelles liées à Android, Google Search, le Play Store et les applications obligatoires. Or, même si ces obligations ne sont plus écrites, les constructeurs prendront-ils le risque de se détourner de Google ? Jusqu’à présent, tous les constructeurs avaient la possibilité de se passer de tous les outils de Google en adoptant simplement la version « Vanilla » d’Android, laquelle est open source, et en adaptant son interface. Certains en vivent d’ailleurs très bien (Xiaomi et Amazon par exemple). Mais même les constructeurs chinois certifient leurs mobiles quand ils abordent le marché international.

En effet, quand une marque se targue de proposer un smartphone complet et fonctionnel, va-t-elle adopter un logiciel incomplet sous prétexte qu’il est plus « libre » ? Non, il proposera le meilleur. Regardez Apple : Google Search est le moteur de recherche par défaut de Safari, malgré les tensions entre les deux sociétés. C’est bien la preuve qu’il existe une différence entre l’obligation contractuelle et l’obligation commerciale. Pas sûr donc que les constructeurs saisissent cette opportunité, d’autant que Google a annoncé, lors de la conférence Nexus, que le nombre d’applications préinstallées baissera avec Marshmallow...

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