Judiciairement, Apple a mal fini l’année 2015. D’abord, la guerre des brevets contre Samsung a pris un tournant inattendu avec l’invalidation de son brevet sur le pinch to zoom et un jugement qui réduit pratiquement de moitié les dommages et intérêts que le Coréen doit payer. Somme que la firme de Cupertino pourrait devoir rembourser prochainement, Samsung ayant porté le dossier devant la Cour suprême américaine pour un troisième round. Ensuite, une class-action a été ouverte contre la marque par des propriétaires mécontents de l’iPhone 4S. Ces derniers ont mis à jour leur smartphone, suite aux promesses d’Apple d’une fluidité retrouvée grâce à iOS 9 (et mise à mal par iOS 8). Mais aucune amélioration n’a été constatée. Pire : le téléphone est encore plus lent qu’auparavant.
Les propriétaires d'iPhone 4S mécontents
La plainte, qui regroupe plus d’une centaine de plaignants, a été déposée auprès du tribunal fédéral de New York le 29 décembre dernier, soit en début de semaine dernière. Et le document officiel évoque des dommages dont le montant serait évalué à 5 millions de dollars, sans les intérêts et les frais judiciaires. Évidemment, 5 millions de dollars pour Apple, ce n’est pas grand-chose quand nous comparons aux milliards de dollars de bénéfices que la firme engendre chaque trimestre. Mais pour son image de marque, un tel procès est toujours une mauvaise nouvelle. Car les clients d’Apple sont réputés fidèles et plus enclins à pardonner quelques erreurs industrielles.
Qu’est-il reproché à Apple ? Deux points sont soulevés dans la class action. D’abord une publicité mensongère vis-à-vis d’iOS 9 et de sa compatibilité avec l’iPhone 4S. Souvenez-vous, en septembre dernier lors de la présentation de l’iPhone 6S, Craig Federighi a indiqué qu’iOS 9 apporterait un gain de performance sur tous les iPhone, 4S compris, en comparaison d’iOS 8. Or, les constatations des clients sont totalement inverses à cette promesse : non seulement ce n’est pas mieux, mais ce serait pire. D’ailleurs, nous avions publié en septembre dernier un article sur les premiers retours des usagers mécontents. Cette affaire remonte donc certainement à cet événement.
Rester en première ou changer de voiture ?
Le second point qui est reproché à Apple, c’est l’impasse dans laquelle sa politique de mise à jour place ses clients. En effet, après avoir mis à jour un appareil sous iOS 9, il n’y a aucune possibilité de retour en arrière. Selon le rapport déposé au tribunal fédéral, les consommateurs ont l’impression qu’ils ont le choix entre rester bloqués avec un iPhone inopérable ou en acheter un nouveau au prix fort. Et nous savons à quel point un iPhone est cher (notamment en France avec la TVA à 20 % et la taxe à la copie privée). Si Apple donnait la possibilité de revenir à une version antérieure de son OS, les consommateurs seraient donc certainement tentés de revenir à iOS 8, iOS 7 voire même iOS 6. Ce qui n’est évidemment pas du goût d’Apple qui se vante chaque année de l’absence de fragmentation dans son parc de smartphones et de tablettes.
Ce n‘est pas la première fois qu’une class action est menée contre Apple pour des faits similaires. En 2011, la firme était également poursuivie parce que les propriétaires d’iPhone 3G se plaignaient des faibles performances de leur téléphone suite à la mise à jour vers iOS 4. Même si personne ne place un couteau sous la gorge de chaque consommateur pour le forcer à réaliser une mise à jour (ce serait d’ailleurs plutôt à Google de le faire compte tenu de la fragmentation d’Android), il paraît évident d’attendre un certain niveau de service après-vente de la part d’une société qui affirme chaque année révolutionner le monde de la téléphonie mobile avec ses produits. Remarquez toutefois qu’elle est la seule à proposer un suivi des mises à jour sur une telle durée. Est-ce une bonne chose ou non ? C’est un autre sujet.
Un procès contre l'obsolescence programmée
Car, au fond, ce recours collectif ne concerne pas une politique de mise à jour ou une promesse non tenue. Elle concerne avant tout l’obsolescence programmée des produits, un concept qui revient régulièrement quand il s’agit d’Apple. La question n’est donc pas de savoir si Apple peut faire quelque chose pour améliorer les performances des iPhone 4S sous iOS 9. Elle est de savoir si Apple veut bien faire quelque chose pour arranger cette situation.
Comme le soulève le document officiel, le client, qui a généralement dépensé de l’argent sur l’App Store pour des applications, n’a pas d'autre choix que de racheter un téléphone chez Apple pour les retrouver si les mises à jour d’iOS détériorent leur usage quotidien. Quelles sont les solutions ? Apple pourrait enfin dévoiler une version de son OS optimisée pour les anciens terminaux. Ou accepter de downgrader les téléphones sous iOS 9 (et iOS 8). Dans les deux cas, il y a un risque de rallonger le cycle de renouvellement des iPhone. Et à l’heure où les prévisions de vente ne sont pas si bonnes que cela, cette situation est évidemment à éviter.