Il y a plus de deux ans, en janvier 2014, nous réalisions dans nos colonnes un article sur un projet un peu fou en cours chez Google : Smart Lens. Il s'agit de lentilles de contact intelligentes qui disposent de certains composants électriques permettant de mesurer le taux de sucre dans le sang en temps réel des diabétiques. Beaucoup moins contraignantes et particulièrement innovantes, ces lentilles de contact ont quelques mois plus tard fait l'objet d'un contrat de licence entre Google et Novartis, la société pharmaceutique suisse prenant en charge leur production et leur distribution. En outre, ces lentilles de contact ont permis de mesurer l'importance des biotechnologies et des sciences humaines chez Alphabet dont l'une des filiales est dédiée à ce type de sujets.
Des lentilles de contact pour afficher de la réalité virtuelle
Et cela a certainement donné quelques idées à la concurrence. Comme Samsung qui a déposé le 26 septembre 2014 un brevet appelé « lentille de contact intelligente pour réalité augmentée et méthode pour fabriquer et faire fonctionner le produit ». Comme vous pouvez le constater dès le titre, il ne s'agit pas de lentilles de contact à but médical, mais commercial. Dans ces lentilles de contact ont été (théoriquement) intégrées tout ce qu'il faut pour la réalité virtuelle et la réalité augmentée : un capteur photo, un écran minuscule, des capteurs de mouvement (notamment le mouvement des paupières) et des capteurs réseau, car toute l'intelligence ne sera évidemment pas dans les lentilles, mais dans un appareil connecté type smartphone.
Comme dans de nombreux projets aussi ambitieux (car, à bien y regarder, il s'agit là d'un projet à la portée plus forte encore que les lunettes connectées et les casques de réalité virtuelle), se posent de nombreuses questions quant à la faisabilité d'un tel produit et à la protection de la vie privée et des informations personnelles. D'abord sur la faisabilité. Vous avez remarqué que nous ne parlons pas de la source d'alimentation dans ce projet. Tout simplement parce que le sujet est occulté. Il n'y a pas aujourd?hui de sources d?énergie assez petite et assez endurante pour alimenter un capteur photo microscopique, un écran et une connexion sans fil. Il y a donc un côté opportuniste dans ce brevet : les technologies nécessaires ne sont pas disponibles, mais Samsung bloque quand même l'idée en Corée afin de conserver l'idée.
Comment savoir que quelqu'un n'est pas en train de filmer ?
Second point : la vie privée. Nous nous souvenons de tous les problèmes et les cas de conscience (avec certaines personnes agressées) qu'ont suscités les Google Glass. Et pourtant, il était facile de voir une personne les porter. Il était même facile de voir si quelqu'un est en train de filmer puisqu'une LED rouge s'allume quand la caméra est active. Là, il est d'abord évident qu'aucune lumière ne s'allumerait si le capteur filme. Ensuite, il est difficile de voir quelqu'un porter des lentilles de contact. Comment protéger son image, sa vie privée et ses informations personnelles quand, potentiellement, des capteurs photo se trouvent à la hauteur de n'importe quelle paire d'yeux ? Voilà un concept qui ne va évidemment pas être simple de démocratiser.