Huawei symbolise certainement le mieux l'ambition de la scène technologique chinoise. Passée directement en troisième position mondiale sans passer par les cases précédentes grâce à une stratégie agressive, mais aussi qualitative, la marque ne cache plus son intention de remplacer Apple, voire même Samsung en tête du marché des smartphones. Et jamais une autre entreprise n'a montré autant de capacité à réaliser cet objectif.
La recette des Mate améliorée
Il faut dire que les produits de Huawei gagnent, année après année, en qualité et en performance. Les châssis sont désormais majoritairement premium et les chipsets HiSilicon offrent une alternative crédible à MediaTek (à défaut de Qualcomm). Nous avons fait cette constatation il y a peu, lors de notre test du P9. Et nous la réitérons encore avec le Mate 8 qui fait l'objet de ce test complet, même si, pour ses phablettes, Huawei semble davantage privilégier les atours que la fiche technique :
- dimensions : 157,1 x 80,6 x 7,9 mm
- poids : 185 grammes
- Châssis en aluminium à l'arrière et protection en verre renforcé Gorilla 4 de Corning
- écran IPS Neo LCD Full HD de 6 pouces d'une résolution de 368 pixels par pouce
- rapport entre écran et taille du mobile : 78 %
- chipset HiSilicon Kirin 950 composé de 4 coeurs Cortex-A72 cadencés jusqu?à 2,3 GHz, de 4 coeurs Cortex-A53 cadencés à 1,8 GHz et d'un GPU ARM Mali-T880-MP4
- 3 ou 4 Go de mémoire vive
- 32 ou 64 Go de stockage interne (extensibles par microSDXC)
- batterie 4000 mAh non amovible
- capteur photo 16 mégapixels IMX298 de Sony, objectif 27 mm ouvrant à f/2.0, stabilisateur optique d'image, flash true-tone, autofocus à détection de phase, compatible 1080p en vidéo
- webcam 8 mégapixels à l'avant avec objectif 26 mm ouvrant à f/2.4
- lecteur d'empreinte digitale à l'arrière
- compatible LTE catégorie 6, WiFi ac dual band, Bluetooth 4.2, NFC, radio FM, GPS Glonass et microUSB
- Emotion UI 4.0 sur une base Android 6.0 Marshmallow
La fiche technique du Mate 8 est assurément dans la bonne moyenne du marché. Un bon capteur photo, un chipset de bonne facture, un très large écran. Nous regrettons avec un tel écran l'absence du Quad HD, même si nous ne sommes pas sûrs que le Kirin 950 aurait été capable de le gérer. Nous remarquons de nombreuses améliorations entre le Mate 8 et le Mate 7, notamment en photo. Notez que le mobile reçu à la rédaction est numéroté NXT-L29. Il s'agit d'une version dual SIM avec 3 Go de mémoire vive et 32 Go de stockage interne. Attendez-vous donc à des résultats très similaires à ceux du P9, voire légèrement moins bien. Et donc largement en dessous du Galaxy S7 Edge. Mais nous verrons cela en temps voulu.
Des atours de plus en plus premium
Commençons d'abord par les atours du Mate 8. Comme vous pouvez le constater sur ces photos, l?écran de la phablette est le premier signe distinctif qui saute aux yeux. Les bordures tout autour de l?écran sont particulièrement fines. Notez cependant que c?était déjà le cas avec le Mate 7. En revanche, Huawei est parvenu à les optimiser plus encore : avec la même taille d?écran, 6 pouces, le Mate 8 est moins large de 0,4 mm et plus haut de 0,1 mm. Le ratio entre la surface de l?écran et la surface du téléphone atteint les 78 %, contre 77,6 % pour son prédécesseur.
Une telle configuration implique que les touches de navigation soient évidemment virtuelles et que le lecteur d'empreinte digitale soit déporté à l'arrière. Huawei continue donc de préférer placer cet équipement à l'arrière, nécessitant l'utilisation de l'index et non le pouce comme il est d'usage avec les lecteurs frontaux ou sur les côtés. Dans l'ensemble, la façade avant du mobile est très sobre, à l'image du positionnement esthétique du téléphone qui mise sur l?élégance.
Une élégance qui se retrouve aussi sur la coque en aluminium. L'ensemble est fait de trois pièces distinctes. D'abord la pièce centrale qui couvre le dos du haut du capteur photo jusqu'en dessous des marquages liés aux certifications. Elle déborde ensuite sur les tranches latérales (où se trouvent les boutons mécaniques à droite et le tiroir des SIM à gauche) pour rejoindre l?écran 2.5D et le verre minéral Gorilla Glass 4, sans pour autant les protéger. Et c'est peut-être un peu dommage.
La seconde partie couvre la tranche inférieure, entre les deux séparations « anti-antennagate », où sont logés le haut-parleur (la grille de droite), le microphone (certainement derrière la grille de gauche) et le port USB type C. La troisième partie couvre la tranche opposée où se trouve le jack 3,5 mm et le micro secondaire. Ces deux dernières parties ne touchent pas la première au dos : les extrémités hautes et basses du châssis sont en plastiques, certainement pour améliorer la réception.
Tenue à deux mains obligatoire
Il y a une certaine élégance dans le Mate 8. Le smartphone profite d'une belle construction avec des matériaux premium. Ce qui offre une sensation très agréable une fois en main. Cependant, n'espérez pas le manipuler convenablement avec une seule main, même avec l'interface à une main tant les dimension du smartphone sont grandes. Nous avions éprouvé la même chose avec le Mate 7, et le Mate 8 ne corrige pas ce léger point faible. Cette phablette se tient à deux mains : il faut vous y faire.
L?écran du smartphone, une dalle IPS-NEO Full HD offre un meilleur rendu que le Mate 7, même si la définition et la résolution de leurs écrans sont les mêmes. Il s'agit en effet d'une génération d?IPS plus avancée, avec une meilleure luminosité et un peu plus de contraste. Encore une fois, la définition Quad HD aurait eu tout son sens ici, même si la résolution de la dalle dépasse ici largement les capacités de l'oeil humain. Cependant, nous savons également que certains usages, comme la lecture de page web sans zoom, tirent parti des hautes résolutions qu'offrent les Quad HD.
Une interface inspirée dans tous les sens...
Une fois allumé, l?écran dévoile Emotion UI (ou EMUI) 4.0, basé sur Android 6.0 Marshmallow. Il ne s'agit pas de la version 4.1 que nous retrouvons dans le P9 ou le Honor 5C. Il s'agit d'une version très proche de celle que nous avons rencontrée lors de notre test du P9. Nous n'avons pas remarqué de réelles différences entre les deux interfaces, outre un changement dans les icônes des applications système qui adopte ici un filtre « métallisé ». Nous nous doutons qu'il existe d'autres modifications, mais elles sont minimes (comme le changement de disposition des outils de réglages fins dans le mode professionnel de l'appareil photo). Les applications masquées et les interactions avec la surface tactile du lecteur d'empreinte, vus dans EMUI 4.1, sont également là.
Emotion UI tire ici parti de la largeur de l?écran de 6 pouces avec une cinquième colonne pour les applications et des widgets qui prennent de l'ampleur. Le choix des applications placées sur l?écran d'accueil de l'interface est assez révélateur du positionnement très « business » de ce téléphone : agenda, email, téléphones, paramètres. Sur le P9, Huawei avait déporté les paramètres, les emails et l'agenda en seconde partie, pour y placer la messagerie SMS/MMS.
Sur le second écran, nous retrouvons d'autres applications système, comme les lecteurs multimédias, le sélecteur de thème, Hi Care ou le gestionnaire de téléphone. Ce sont des applications qui font partie de l?écosystème Huawei / Honor depuis longtemps maintenant. Signalons également que les applications tierces ont définitivement disparu, ce qui n'est pas plus mal pour libérer de l'espace (l'utilisateur ayant accès à 24 Go sur les 32 Go intégrés).
Excellente autonomie...
Nous en venons justement aux performances du smartphone. Il y a une bonne et une moins bonne nouvelle. La première, la bonne, c'est l'excellente autonomie du Mate 8. Lors de nos séances de test, quand les autres mobiles disposant de 3000 mAh tiennent difficilement la journée, le Mate 8 n'a dépensé que la moitié de la capacité de sa batterie, laissant largement de quoi finir la journée et entamer la seconde. Selon notre estimation, la promesse d'une autonomie de deux jours n'est pas galvaudée.
La seconde nouvelle est moins bonne et nous l'avons évoquée lors de la présentation de la fiche technique du smartphone : si esthétiquement le smartphone est beau, il n'est pas aussi performant qu'un iPhone 6S Plus ou un Galaxy S7 Edge, pour un prix qui frôlait pourtant au lancement les 600 euros. Aujourd?hui, le Mate 8 se négocie davantage autour des 550 euros dans certaines boutiques, soit le prix d'un P9 neuf. Et, techniquement, ce n'est pas si incohérent. Les performances des deux modèles de Huawei sont très proches.
... mais des performances un peu justes
Dans les chiffres, le Mate 8 atteint 92184 points sur AnuTu v6, soit juste au-dessus du Snapdragon 810 et de l?Exynos 7420 et juste en dessous du Kirin 955. Ce qui semble logique compte tenu de la configuration de chacun de ces chipsets. Le Kirin 955 est identique au Kirin 950 du Mate 8 à une différence près : la fréquence des coeurs Cortex-A72. Les Exynos 7420 et Snapdragon 810 s'appuient sur un quad-core Cortex-A57 pour les tâches les plus lourdes, des coeurs moins performants que les Cortex-A72. Cependant, le Kirin 950 est 30 à 60 % moins rapide que l?Exynos 8890 et le Snapdragon 820.
Pourtant, les Cortex-A57 montrent quelques ressources insoupçonnées. Sur Basemark OS II, le chipset atteint 2000 points et sur Geekbench 3, il dépasse les 1700 points en single-core et les 6300 points en multi-core. Soit des scores parfois équivalents aux chipsets des haut de gamme de ce début d'année. Ce qui veut dire que les coeurs applicatifs sont capables de prendre en charge des tâches lourdes. Alors, qu'est-ce qui pèche ? C'est le GPU. Le choix du Mali-T880 aurait pu être intéressant si la version choisie comptait plus de 4 coeurs (comme sur le Galaxy S7)... Les scores sur 3DMark sont moyens, comme avec le P9.
Il aurait dû être un excellent mobile multimédia
Et ce petit manque de puissance au niveau graphique est franchement dommage, car le Mate 8 aurait pu être une excellente plate-forme multimédia. La largeur de son écran. Une définition suffisante pour afficher des images de bonne qualité. La puissance de son haut-parleur. La capacité de sa batterie. Et une puissance suffisante pour la majorité des besoins d'aujourd?hui. Comme avec le P9, Dead Trigger 2, notre jeu étalon, s'est positionné de lui-même sur la meilleure qualité graphique. Une excellente nouvelle justifiée par un comportement exemplaire. Le jeu est fluide et l?écran offre une très bonne immersion. En revanche, sur des jeux un peu plus exigeants, comme Modern Combat 5, le jeu s'est positionné sur une qualité graphique intermédiaire, confirmant notre première impression.
Ce n'est pas le seul petit défaut du Mate 8. Le lecteur vidéo, par exemple, similaire à celui du P9, ne propose pas de paramétrage avancé, ni même le décodage des sous-titres. Nous trouvons cela d'autant plus dommage que le format phablette du Mate 8 se prête excessivement bien à ce type d'exercice. Heureusement, des lecteurs vidéos tiers existent sur le Play Store pour corriger ce défaut. Mais il est cependant dommage que Huawei ne s'aligne pas ici sur Samsung, dont les Galaxy sont affublés d'un excellent lecteur multimédia. Petite parenthèse sur le haut-parleur situé sur la tranche inférieure : le mobile étant beaucoup plus large que le P9, les doigts ne viennent que très rarement obstruer la grille (si vous tournez la tête du mobile vers la gauche).
Très correctes en photo, mais pas toujours très nettes
Dernier focus : la photo. Le Mate 8 ne bénéficiant pas du partenariat entre Huawei et Leica, l?équipement photographique du Mate 8 est assez classique, même s'il marque une vraie amélioration vis-à-vis du Mate 7. La webcam passe de 5 à 8 mégapixels et obtient la compatibilité Full HD. Le capteur principal passe de 13 à 16 mégapixels et gagne la stabilisation optique et un autofocus à détection de phase. En outre, avec le passage à Emotion UI 4.x, le Mate 8 gagne une application photo avec un mode expert. Nous attendons donc des clichés meilleurs qu'avec le Mate 7 (presque le même que le celui du P9). Et c'est le cas. Ils sont de très bonnes factures.
Comme vous pouvez le constater sur le cliché ci-dessous, le Mate 8 est capable de réaliser des photos lumineuses et équilibrées. Le ciel parisien printanier est bien bleu et les voitures garées dans la rue en contrebas restent visibles. Il y a deux petits soucis dans cette photo : les taux de contraste ne sont pas bons et l'image présente du grain assez rapidement quand vous zoomez. Cela manque donc de piqué. Toutefois, le résultat sera largement suffisant pour les réseaux sociaux et le partage avec vos proches. Cependant, nous ne sommes pas à la hauteur des résultats d'un Galaxy S6/S7 ou d'un iPhone 6/6S. Le Mate 8 confirme notre impression sur le P9 : ce dernier est le meilleur appareil photo proposé par Huawei.
Pas encore au niveau de la concurrence... mais s'en rapproche
En conclusion, le Mate 8 est une phablette ostentatoire qui mise davantage sur les qualités de sa construction que sur la puissance de sa plate-forme technique. Le smartphone est élégant et agréable à manipuler, malgré une taille imposante qui oblige l'usage simultané des deux mains. Son interface, toujours coincée entre Android et iOS, s'améliore et s'enrichit de version en version. Et son châssis premium vaut bien celle d'autres marques du Top 5 mondial. Largement plus performant que le Mate 7, le Mate 8 représente un pas de plus pour Huawei vers une proposition plus en phase avec le public que le constructeur vise avec cette gamme.
Cependant, nous ne pouvons nous empêcher d'avoir un vrai regret à l'issu de ce test. Le Mate 8, vendu au lancement à 599 euros est certes moins cher que le Galaxy S7 Edge et l?iPhone 6S face auxquels Richard Yu, le patron de Huawei s'est comparé lors de l'officialisation de la phablette. Mais elle ne s'appuie pas sur le même écosystème de services et d'applications et elle ne dégage pas une évidente évolutivité. Si la phablette est capable de prendre en charge de nombreux usages actuels, qu'en sera-t-il de ceux de demain?? Car à ce prix, il paraît évident que le Mate 8 est plus un investissement qu'un achat spontané. Un investissement qui perdra certainement davantage en valeur que les modèles des concurrents cités plus haut.