Tout savoir sur : Apple bientôt obligé de rapatrier aux US une partie de la production des iPhone ?
Maintenant que Donald Trump, le président élu des États-Unis, s’apprête à entrer à la Maison-Blanche, certaines de ces déclarations sonnent différemment de l’époque où il n’était encore que le candidat républicain. Souvenons-nous, par exemple, des appels au boycott contre les produits d’Apple ou encore des propositions pour augmenter les taxes que la firme de Cupertino devrait payer. L’une d’entre elles pourrait s’élever à 35 % sur tous les Mac, iPad ou iPhone qui sont manufacturés en dehors des frontières américaines. Voilà qui, évidemment donne à réfléchir.
Selon le portail économique Nikkei Asian Review, Apple aurait rencontré ses deux principaux sous-traitants, Pegatron et Foxconn, pour étudier la possibilité de produire aux États-Unis tout ou partie des produits qui leur sont confiés. Cette rencontre aurait eu lieu en juin dernier, soit cinq mois avant l’élection présidentielle. Une date qui fait réfléchir, car l’issue des élections n’était évidemment pas celle qui était alors annoncée par les sondages. Selon le média asiatique, Pegatron aurait refusé d’y réfléchir, tandis que Foxconn, pour qui Apple représente 50 % de son chiffre d’affaires, aurait accepté de se soumettre à l’exercice.
Un coût de production multiplié par deux
Plusieurs problèmes auraient été soulevés par le projet. Des problèmes au niveau économique, au niveau des fournisseurs de composants et au niveau des ressources humaines. Sans parler des tensions que cela va engendrer entre les différents gouvernements (américain, chinois et probablement bientôt indien). Premier problème : les coûts de production. Selon un analyste interrogé par Nikkei Asian Review, produire un iPhone aux États-Unis coûterait deux fois plus cher (il coute aujourd’hui 225 dollars pour un modèle 32 Go). L’analyste ne précise pas s’il s’agit des coûts de main-d’oeuvre uniquement ou si cela inclut aussi le prix des pièces détachées. Ce qui nous amène au second problème.
Car résoudre cette équation ne dépend pas uniquement de la relocalisation des usines et des chaînes de montage. Il faut aussi rapprocher les usines qui fabrique les éléments technologiques, comme l’écran (fabriqué par LG, Sharp et Japan Display), les barrettes de RAM (en provenance de Samsung), les chipsets (produits par TSMC et Samsung), ou encore les puces de stockage (de SK Hynix et Toshiba), etc. Si les pièces détachées sont produites hors des États-Unis, la taxe pourrait s’appliquer, sans parler des coûts de transport supplémentaires qui n’existent pas à Shenzhen. Sharp aurait indiqué qu’il serait difficile de ne pas suivre Apple dans ses décisions. TSMC aurait indiqué que le coût de l’Apple Ax serait beaucoup plus cher s’il était obligé de le fabriquer hors de Taïwan.
Les Américains prêts à travailler dans les usines ?
Second problème : la main d’oeuvre. Il n’y en a plus outre-Atlantique. En délocalisant l’emploi dans le secteur industriel, les États-Unis sont maintenant démunis, alors qu’il faudrait des centaines de milliers de personnes pour fabriquer les téléphones (Foxconn compte 600 000 postes environ, plus de la moitié étant dévolu à Apple). De plus, il est presque certain que le salarié américain refuserait de travailler tous les jours sur la fabrication des téléphones à un salaire qui serait proche du SMIC. En Chine, le problème commencerait même déjà être soulevé : la jeunesse chinoise refuse de plus en plus ces postes, pour la pénibilité ou la précarité (ou les deux). Nous indiquions précédemment que les grands groupes chinois délocalisaient une partie de leur production en Inde.
S’il est presque impossible (mais pas totalement) de rapatrier aux États-Unis l’ensemble de la production, un consensus pourrait être trouvé sur un pourcentage (il n’est pas dit si cela inclut ou non les composants). Un pourcentage qui serait dévolu aux États-Unis, le reste du monde étant servi par des téléphones produits en Chine. Cela pourrait avoir du sens. Nous nous rappelons que Motorola s’était essayé à produire un smartphone aux États-Unis, avec le premier Moto X. Aujourd’hui, l’usine est fermée, car les coûts de production étaient excessifs. Cependant, il y a une différence entre Apple et Motorola : la marge brute. Apple réalise une marge de 40 % environ sur chaque mobile, alors que Motorola doit tourner autour des 20 %. De plus le prix de vente d’un iPhone est plus élevé. Apple pourrait donc rester bénéficiaire malgré tout (s'il n'augmente pas le prix de vente de ses téléphones). Mais ce sont les actionnaires qui feront grise mine...
Moins d'industrie, mais plus d'idées
Vous noterez que ce sujet porte sur Apple, parce que la firme est la première capitalisation boursière à Wall Street et qu’elle a fait l’objet de plusieurs attaques de Donald Trump durant sa campagne présidentielle. Mais une possible taxe sur les produits manufacturés à l’étranger pourrait concerner toutes les marques commercialisant des produits manufacturés (Motorola, Blu Products en téléphonie, mais il y en a bien d’autres), ainsi que les initiatives indépendantes nées sur les plates-formes de financement participatif (quel avenir pour Peeble dans ces conditions ?). Si la délocalisation a clairement amputé le nombre d’emplois dans l’industrie, elle a aussi offert des opportunités business à des entrepreneurs. Quelle solution sera la plus préjudiciable à long terme ? Difficile à dire.