Super Mario Run a de quoi décevoir. Il déçoit d’abord les joueurs. Si la réalisation technique est irréprochable, ce sont les choix éditoriaux et tarifaires de la firme japonaise qui sont discutables. Le prix du seul achat intégré est élevé (10 euros) et le contenu qu’il offre n’est pas mirobolant (accès aux mondes 2 à 6, soit 15 niveaux solo). Pour le reste, rien n’est payant : pas d’endurance pour lancer une partie, pas de boutiques pour acheter des tickets de défi supplémentaires, etc. Mais le jeu lasse rapidement et Nintendo a promis qu’il n’y aurait pas de nouveaux mondes. L’intérêt est donc limité.
Tout le monde est déçu
Il déçoit également les investisseurs et les financiers. Le jeu a battu un record historique de téléchargements (40 millions en 4 jours seulement), mais il n’a engrangé « que » 21 millions de dollars de recette. Soit 2,1 millions de joueurs qui ont acheté l’accès aux 6 mondes pour libérer la princesse Peach. Soit un taux de transformation de 5 % environ. Ce qui dans le monde de la mobilité est plutôt bon. Mais qui, dans celui des jeux vidéo, est assez maigre. D’où une baisse du cours de bourse de Nintendo à Tokyo.
Et il doit décevoir Nintendo qui attendait certainement d’excellents retours de la part des journalistes et des joueurs. Or, le jeu fait souvent l’objet de critiques acerbes, car les attentes et la réalité ne se sont pas rejointes. Selon nous, ce n’est pas tant le jeu qui est en cause, mais le décalage entre les us et coutumes du jeu mobile et la réponse de Nintendo. Car les joueurs n’y sont pas habitués à acheter des jeux à 10 euros (ils ont généralement un mal fou à ouvrir le porte-monnaie, même pour un euro). Et ils sont habitués à voir pléthore d’achats intégrés. Mais le sont-ils autant que cela ?
Alors, vous l'aimez mon freemium ?
Une expérience très intéressante a été faite. Nos confrères de PhoneArena ont posé une douzaine de captures d’écran fictive d’une version « freemium » de Super Mario Run. Ici, tout est susceptible de devenir un achat intégré, de la promotion sur les réseaux sociaux ou une occasion de regarder une publicité vidéo : débloquer un monde, revenir à la vie après la fin du compteur de temps, étendre la capacité du porte-monnaie, des vies pour revenir en jeu après une collision, acquérir plus de Toad dans les défis (ou ne plus en perdre quand vous êtes absent), etc. Finalement, s’il faut 1 ou 2 euros par monde, 1 ou 2 euros pour acheter des objets pour le château, 1 ou 2 euros pour garder sa population de Toad, nous arrivons rapidement à 10... 20... 50 euros ?
Un petit remontant à 1 euro pour continuer la partie ?
Et c’est là où nous nous souvenons des paroles de Nintendo : 10 euros, c’est le prix pour obtenir d’un coup toute l’expérience du jeu, face à des Candy Crush ou des Angry Birds qui multiplient les annonces publicitaires et les objets payants. Et c’est là où nous trouvons qu’effectivement, il s’agit certainement d’une « protection » contre les abus. Nous jouons tous à un jeu freemium. Et nous savons tous à quel point certains titres peuvent tirer sur la corde sensible pour amener les joueurs à dépenser de l’argent. Mais nous sommes pour la plupart adultes et responsables. Qu’en est-il des bambins qui jouent avec le mobile de leurs parents, ceux que cible justement Nintendo ?
Ne soyons donc pas trop durs envers Nintendo. Non, Super Mario Run ne vaut pas les 10 euros que la firme en demande pour le mode solo, malgré la qualité de sa réalisation, car il manque de contenu. Mais si le jeu avait vraiment été freemium, la note aurait pu être beaucoup plus salée. L'intention était donc bonne. Mais pas forcément la manière de le faire.