Vous l’avez certainement remarqué : cela fera bientôt un an que nous n’avons pas évoqué dans nos colonnes Ubuntu Touch. Le système d’exploitation de Canonical n’anime qu’une dizaine de smartphones : une édition spéciale du Pro 5 de Meizu, une autre du MX4, ainsi que quatre produits chez BQ. Les deux marques sont les seules à avoir apporté leur soutien à l’initiative. C’est trop peu s’imposer. C’est donc sans surprise que Canonical a décidé de jeter l’éponge. Fini d’investir dans le système d’exploitation mobile. Plus loin encore, fini d’investir dans « Unity8 », le noyau qui devait animer toutes les plates-formes issues de la convergence des systèmes Ubuntu (PC, mobile, tablette, etc.).
« J’avais tort »
Dans un message posté sur le blog officiel de l’entreprise, son patron et fondateur, Mark Shuttleworth, confirme cette information. Il explique que les raisons sont essentiellement économiques : l’idée a beau être belle, les produits innovants, notamment vis-à-vis des standards et de l’hégémonie du marché, il faut se rendre à l’évidence qu’Ubuntu Touch est d’abord un coût pour l’entreprise et non un investissement susceptible de rapporter un jour. Unity8 sera donc abandonné dans son ensemble et Ubuntu pour PC reprendra son ancien noyau avec la prochaine version estampillée 18.04.
Une phrase dans ce texte est particulièrement dure : « J’ai pensé que si la convergence des systèmes était le futur et que si nous apportions une solution gratuite à cette tendance, alors notre initiative serait largement appréciée autant dans la communauté du logiciel libre que dans l’industrie technologique, où les constructeurs sont significativement frustrés par les solutions fermées existantes. J’avais tort dans les deux cas. »
Prisonniers d'Android
Pour chaque typologie d’utilisateur, la raison est différente. Les concepteurs de logiciels et d’applications voyaient en Ubuntu Touch un écosystème supplémentaire, ajoutant à la fragmentation existante. Et les fabricants de mobiles préféraient suivre les tendances du marché (massivement tourné vers Android) ou développer leurs propres solutions (comme Samsung ou LG, avec Tizen et webOS), plutôt que de prendre un risque avec éditeur tiers, même s’il s’agit de Canonical. En clair, si ce n'est pas Android, ce n'est pas viable.
Ce n’est pas la fin pour Canonical et Ubuntu, puisque l’entreprise est très active dans les secteurs b-to-b (station de travail, serveurs, datacenter, IoT, etc.). Mais il n’y aura plus de smartphone avec Ubuntu dans un futur proche. Nous avions testé en mai 2015 l’Aquaris E4.5 Ubuntu Edition de BQ. Nous avions alors noté à l’époque que le système d’exploitation avait de bonnes bases, mais qu’il avait encore besoin de s’étoffer, de s’améliorer, de prendre de l’envergure. Peut-être qu’un jour, ce sera le cas. Mais les chances sont particulièrement minces.