Même s’il n’est pas le premier à avoir opté pour cette stratégie (Samsung l’ayant fait bien avant), Apple a clairement démontré pourquoi la conception d’un chipset (au moins partiellement) est pertinente pour un fabricant de smartphones. La raison est simple : concevoir hardware et software permet d’améliorer les interactions entre les deux et d’optimiser l’ensemble afin d’améliorer les performances et l’autonomie. Les iPhone sont des modèles du genre. Les Galaxy le deviennent. Et il n’est pas improbable que Huawei y parvienne aussi.
Google entre enfin dans la danse
Cette stratégie, tous les grands fabricants rêvent de l’adopter pour différentes raisons (et toutes en même temps), aussi bien techniques, économiques ou commerciales. En outre, cela permet d’être moins dépendant du fondeur (MediaTek, Spreadtrum ou Qualcomm). Mais rares sont les sociétés qui pérennisent ce développement couteux. Huawei, Apple et Samsung y parviennent grâce aux volumes de vente. LG et Xiaomi, par exemple, n’ont, pour l’instant intégrer leurs propres chipsets que dans un seul modèle respectif.
Un autre groupe devrait cependant prendre ce chemin. Il s’agit de Google. Les rumeurs affirment depuis longtemps que la firme de Mountain View travaille sur le sujet. Mais une nouvelle fuite vient alimenter le dossier. Selon le magazine américain Variety, Google serait en train de créer une équipe dédiée à la conception de chipset. L’un des responsables de cette équipe s’appelle Manu Gulati, fraichement débauché de chez Apple. Sur son profil LinkedIn, il a indiqué un changement de poste : il est désormais « lead SoC Architect » chez Google. Comprenez responsable de la conception de chipset. Et que ces chipsets seront destinés aux Pixel.
Plus de puissance pour le Machine Learning
Cette embauche est intéressante pour trois raisons. D’abord, cela montre que Google n’en est plus à l’étape de la réflexion, mais de l’action (d’autant que la firme souhaiterait ardemment augmenter considérablement la puissance des Pixel pour ses besoins en intelligence artificielle et en réalité virtuelle). Il est clair que les vrais travaux n’ont pas encore concrètement commencé. Mais ils devraient l’être incessamment sous peu, dès que l’équipe sera majoritairement constituée. Reste à savoir si Google choisira le chemin d’Apple, de Huawei ou de Samsung dans la conception de ces chipsets : coeurs standardisés uniquement dans un premier temps, coeurs customisés dès le départ, ou un peu des deux ? De cette décision dépendront le calendrier et le coût.
Seconde raison de l’intérêt de cette décision : l’impact sur Apple. Manu Gulati était l’un des piliers des Apple Ax, considérés comme l’un des atouts primordiaux des iPhone et des iPad (les Ax font quand même mieux que les autres avec moins). Quel chemin prendra Apple dans les prochaines années ? Si la génération 2017 d’iPhone continue de profiter des travaux du concepteur de chipsets, qu’en sera-t-il à moyen terme ? Peut-être Apple se rapprochera un peu plus d’Intel ? Rappelons qu’Apple intègre depuis la fin de l’année 2016 des modems Intel dans ses mobiles (et non plus exclusivement des modems Qualcomm). Et Intel rêve d’offrir des SoC customisés à Apple.
Un client de moins pour Qualcomm ?
Troisième raison : Qualcomm. La firme californienne semble voir son marché s’effriter de plus en plus. Auparavant acteur incontournable sur les segments premium, le fondeur ne livre désormais qu’une partie minoritaire du marché haut de gamme : une faible partie des Galaxy Sx, aucun modèle Huawei et Apple qui préfère jouer solo. Si les prochains Pixel fonctionneront grâce à des Snapdragon 835 et si la génération 2018 devrait encore faire appel à des composants Qualcomm, ceux de 2019 pourraient faire l’impasse. Tout dépendra du chemin choisi par Google (les fameux chemins évoqués plus haut) : plus les coeurs sont standardisés, plus vite le SoC peut être conçu. Et de là à ce que les constructeurs comme LG ou HTC soient plus interessés par les performances promises par les SoC Google plutôt que par celles des Snapdragon, il n’y a presque qu’un pas.