L'échec de BlackBerry 10 a entraîné de nombreux changements au sein de la firme canadienne. Thorsten Heins a été chassé du trône, repris par un John Chen déterminé à sauver le navire. Entouré d'une nouvelle équipe composée par ses soins, il a rapidement redéfini la stratégie du groupe autour des deux forces qui ont jadis fait sa renommée : les services pro et le clavier physique. Un an plus tard, nous voilà à l'heure d'un premier bilan avec la sortie du Passport.
Premier smartphone de l'ère Chen, le PassPort affiche sans complexe sa volonté de séduire les professionnels avec son clavier physique revisité et son large écran tactile. Son positionnement tarifaire (649 ?, nu) va dans le même sens. Cependant, il ne ferme pas la porte aux autres catégories d'utilisateurs pour autant. Les accrocs aux SMS, messageries instantanées et autres réseaux sociaux ainsi que les réfractaires au tout-tactile n'y resteront sans doute pas insensibles. Même les plus technophiles devraient être intrigués à la lecture de sa fiche technique. En voici un rappel :
- BlackBerry 10.3
- écran IPS LCD de 4,5 pouces d'une définition de 1440 x 1440 pixels
- processeur Snapdragon 801 cadencé à 2,2 GHz
- GPU Adreno 320
- 3 Go de RAM
- 32 Go de mémoire interne (+ microSD jusqu'à 128 Go)
- APN 13 mégapixels avec Autofocus, flash LED et OIS
- webcam 2 mégapixels
- connectivités 4G / Wi-Fi / Bluetooth / NFC
- batterie 3450 mAh
- dimensions : 128 x 90,3 x 9,3 mm
- poids : 196 grammes
Il fait la taille d'un Passport !
Si vous vous demandez pourquoi BlackBerry a décidé d'appeler le Passport ainsi, c'est tout simplement parce que les dimensions du smartphone sont les mêmes que celles du document éponyme. Nous parlons évidemment de la longueur et de la largeur, puisqu'il est autrement bien plus épais. Il est également bien plus lourd. On ne va pas se le cacher, c'est une brique, et les poches de pantalon n'apprécieront pas forcément.
A l'avant, nous retrouvons un large écran carré, coincé entre le logo BlackBerry, le haut-parleur, les capteurs de luminosité/proximité, la LED, la webcam en haut et un clavier de seulement trois rangées en bas. Ce dernier permet finalement de maintenir une hauteur raisonnable. Le problème réside surtout dans la largeur puisqu'elle forcera une utilisation à deux mains dans la plupart des cas, ce qui a l'avantage de faire oublier le poids pour ne laisser qu'une impression de solidité très agréable, à laquelle participe également le cadre en acier inoxydable.
Plus large sur les côtés, il enveloppe les touches du volume et de lecture à droite, le bouton d'alimentation en haut où il croise au passage la prise casque. En bas, nous retrouvons un microUSB et deux haut-parleurs stéréo. Pas de trappe ou tiroir pour les emplacements nanoSIM et microSD, accessibles à l'arrière en retirant la partie de la coque qui se trouve au-dessus de l'appareil photo et son flash. La partie inférieure n'est en revanche pas amovible et garde la batterie au chaud. Soulignons que ces deux parties sont faites d'un plastique mat et doux plutôt agréable au toucher, mais très sensible aux traces de doigts.
Le plus grand, mais surtout le plus bel écran du catalogue BlackBerry
C'est sûr, le Passport demandera un petit temps d'adaptation mais son format atypique a aussi ses avantages. Commençons par cet écran carré. Si sa forme n'est pas réellement une nouveauté chez BlackBerry, sa taille en est une. 4,5 pouces, c'est de loin le plus grand que la firme ait jamais intégré à un smartphone. Celui du Q10, en comparaison, mesure 3,1 pouces. C'est également le mieux défini. BlackBerry passe directement du 720p au 1440p pour une densité de 453 pixels par pouce.
Ainsi, il est idéal pour afficher textes, tableaux ou sites web. Il mènera malheureusement à quelques déconvenues avec les jeux et applications non-optimisés, comme nous le verrons un peu plus tard. Nous regrettons également le retour au LCD, moins flatteur que l'AMOLED pour les blancs et les noirs qui tirent un peu trop sur le gris. C'est d'autant plus fragrant avec la bonne luminosité. Les angles de vision sont bien ouverts. Du bon travail, en somme.
Qui a dit que le clavier n'avait plus sa place en 2014 ?
Continuons avec le clavier, l'autre particularité de ce Passport. Aussi large que l'écran, il est idéal pour taper à deux mains sans avoir les doigts qui se chevauchent. Les touches sont en plus biseautées à gauche ou à droite pour ne pas accrocher les pouces. Il faudra en revanche se faire à leur disposition puisque, en passant de quatre à trois rangées, BlackBerry a dû l'adapter. La barre d'espace se trouve désormais au même niveau que les lettres. Et ce n'est pas tout.
Les accents, les symboles et les chiffres ont été déportés sur l'écran. Un peu déroutant au départ. C'est également là qu'il faudra chercher les prédictions, qui s'affineront au fil des utilisations et qu'il suffira de faire voler d'un glissement de doigt vers le champs de saisie grâce aux capacités tactiles du clavier. C'est évidemment la grande nouveauté du Passport. Il peut ainsi faire office de trackpad géant pour naviguer dans BlackBerry 10.3 sans obstruer la vue de l'écran.
BlackBerry 10 s'améliore encore
Oui, le Passport inaugure une nouvelle ère chez BlackBerry mais aussi une nouvelle version de BB 10. Soulignons au passage qu'elle arrivera sur les terminaux en circulation en fin d'année, voire en début d'année prochaine au plus tard. Pas de grande révolution dans l'interface, si ce n'est l'ajout d'une « barre d'actions ». L'écran de verrouillage présente l'heure, la date, les notifications (avec aperçu) et un raccourci vers l'appareil photo. Il est possible d'afficher une horloge sur fond noir pour la nuit en glissant du bord supérieur vers le centre. La même manipulation depuis le bord inférieur permet de déverrouiller. Elle fonctionne également sans allumer l'écran, ce qui est plutôt pratique puisque le bouton d'alimentation est difficile d'accès.
Nous arrivons alors sur un écran présentant les différentes applications ouvertes, la barre d'état en haut et deux raccourcis en bas (appel et photo). Glissez à droite et vous arrivez dans le Hub, le centre de messagerie rassemblant SMS, emails, alertes, appels... le tout, configurable par compte et ordre de priorité. Glissez à gauche et vous retrouvez la liste des applications installées. Le bord supérieur renferme des réglages rapides à déployer vers le bas avec deux doigts. Le bord inférieur permet de revenir à l'écran d'accueil depuis n'importe quelle application.
De nouvelles applications pour en faire toujours plus !
Les nouveautés les plus intéressantes de BlackBerry 10.3 sont à chercher du côté des applications. Trois ont été ajoutées aux classiques suites multimédia et bureautique, sans oublier Calendrier, BBM et Cartes bien sûr.
La première est BlackBerry Assistant, qui permet de commander le smartphone à la voix ou par écrit en langage « naturel ». Pour l'activer, cliquez sur l'icône dédiée ou le bouton situé entre ceux du volume sur la tranche droite. Sa compréhension est plutôt bonne mais il mettra parfois votre patience à rude épreuve. Il prend en charge l'envoi de messages et emails, la configuration de rappels ou la recherche sur internet. Il remplira également le calendrier mais manque de conversation pour rivaliser avec Siri ou Cortana. Il n'est tout simplement pas là pour amuser la galerie.
La deuxième application, c'est BlackBerry Blend qui permet de retrouver le contenu de son smartphone, notifications comprises, sur ordinateur ou tablette grâce au logiciel du même nom (compatible Mac OS X 10.7 et plus, Windows 7 et plus et Android 4.4 et plus). Il permet également d'envoyer des messages, modifier les paramètres... le tout à distance puisque la liaison se fait via USB, Wi-Fi ou les réseaux cellulaires. Parfait pour rester concentré au bureau sans avoir à jongler entre ordinateur et smartphone, ou si vous êtes parti un peu trop rapidement le matin en laissant le Passport sous la couette...
Enfin, la troisième application ne vient pas de BlackBerry mais d'Amazon, qui ouvre les portes de sa boutique applicative à tous les utilisateurs de BlackBerry. Elle devrait rapidement trouver sa place à côté du BlackBerry World, reconverti en boutique professionnelle. Nous y trouvons les plus populaires des jeux et applications Android. Il est également possible d'en installer manuellement. Seule ombre au tableau, ils ne sont pas forcément optimisés pour BlackBerry 10 ou le format de l'écran.
Mieux vaut tout de même installer (manuellement) un store alternatif
en plus des deux préinstallés pour être tranquille...
Il en a sous le capot !
Ce qui est certain, c'est que le problème ne vient pas de la plateforme technique. BlackBerry a opté pour un Snapdragon 801 composé de quatre coeurs cadencés à 2,2 GHz et d'un GPU Adreno 320. Il s'est de plus montré généreux en mémoire vive en le complétant par 3 Go de RAM. De quoi assurer la fluidité du système mais aussi des jeux.
Ceux que nous avons testés ont tourné comme un charme, et en plein écran, à l'exception d'un seul : Angry Birds Go!. Au pire, le jeu tourne derrière un écran complètement noir. Au mieux, seuls quelques éléments sont affichés. Plutôt gênant. Et ce n'est certainement pas le seul jeu à être touché. Certaines applications le sont sans doute aussi.
Si cela peut vous rassurer, sachez au moins que vous n'aurez sans doute pas à chercher un lecteur multimédia puisque celui que l'on trouve en natif est plutôt complet et décode la plupart des formats sans problème, comme le MKV. Pareil côté audio. Dommage que le format de l'écran ne soit pas réellement adapté pour l'affichage de films ou séries. Reste le son fort et puissant que produisent les haut-parleurs de la tranche inférieure. Il est même possible de percevoir lorsqu'il vient de droite ou de gauche... Comme quoi, la largeur du téléphone n'a pas que des inconvénients.
Angrys Birds Go! se joue dans le noir sur le Passport. Le lecteur vidéo est efficace,
mais l'écran n'offre toujours pas un confort optimal.
Il assure même en photo !
Il semblerait bien que BlackBerry ait pensé à tout. Et cela inclut même la photo. Sur le papier, en tout cas, l'équipement est plutôt prometteur : capteur 13 mégapixels, stabilisation optique, enregistrement 1080p à 60 ips... Qu'en est-il en pratique ? Et bien, cela ne commence pas forcément très bien puisque l'application dédiée n'est pas plus riche qu'elle n'est chaleureuse. Le menu austère renferme très peu de réglages manuels mais quelques scènes et modes de prise de vue pratiques (HDR, TimeShift). Le passage de l'un à l'autre demandera en plus un peu de patience. Tout comme la mise au point et le déclenchement d'ailleurs. C'est un peu dommage.
Mais la persévérance est généralement récompensée par un joli cliché. En effet, les résultats obtenus avec le Passport nous ont plutôt surpris. Et dans le bon sens. Il s'en sort même plutôt bien dans les conditions d'éclairage difficile à condition que le sujet soit fixe, cela sans recours au flash ou au bruit électronique à outrance. Nous n'avons pas été déçus en plein jour non plus, avec un bon niveau de détails. Ils sont même parfois trop accentués. La colorimétrie est juste. L'exposition, également.
Photo prise avec le BlackBerry Passport
Et si vous n'êtes pas tout à fait satisfait, des éditeurs de photos et vidéos plutôt bien fichus devraient vous permettre d'arriver au résultat parfait. BlackBerry a même intégrer un petit logiciel à la Zoe pour la création de petits clips générés automatiquement à partir de prises de la galerie. Il est également possible de les modifier avec la musique de son choix, un titre et un générique dans Story Maker pour les partager. Que demander de plus ?
C'est aussi un bon téléphone...
Une bonne autonomie peut-être. Et bien, ce n'est pas un problème non plus. Nous ne pouvions évidemment pas achever ce test sans évoquer l'autonomie du Passport. Avec sa batterie de 3450 mAh, il tient largement la journée en utilisation normale. Ajoutons également que les utilisateurs profiteront d'une bonne accroche réseau et d'un son puissant lors des appels. Bref, vous ne risquez pas de passer à côté d'un appel important.
Retour gagnant pour BlackBerry ?
BlackBerry fait un retour réussi sur le marché des smartphones haut de gamme avec ce Passport. Belle construction. Bel écran. A l'aise en multimédia et en photo, ce smartphone cumule les points forts. Evidemment, son format atypique le réserve plutôt aux professionnels, qui y trouveront aussi des outils adaptés avec Blackberry Balance et Blend notamment, mais d'autres devraient pouvoir y trouver leur compte à condition qu'ils ne soient pas trop exigeants en matière d'applications ou qu'ils ne voient aucun inconvénient à les installer manuellement.
A cela s'ajoute le savoir-faire de la marque dans la sécurité et la possibilité de gérer un espace privé et un espace professionnel bien distincts. Une réponse unique en son genre dans le monde de l'entreprise.
Reste son prix de 649 ? qui en poussera sans doute certains à attendre le Classic. Cependant, les autres constructeurs ne réclament pas moins pour ce niveau de prestation...